Publications

Article détaillé

Liste des articles.

LES SPÉCIFICITÉS DE L’INTERCULTUREL AFRICAIN ET LEURS IMPLICATIONS EN DIDACTIQUE DU FLES
THE SPECIFICITIES OF AFRICAN INTERCULTURALISM AND THEIR IMPLICATIONS IN THE DIDACTICS OF FRENCH AS A FOREIGN LANGUAGE

Emmanuel MBUNDA ITEKA
(ntekambunga2@gmail.com /
+243901139582)

Résumé

La situation interculturelle exocommunicative avec, d’une part, ses abondantes asymétries, sources d’interférences et, d’autre part, son dualisme psychosociolinguistique et axiologique déséquilibré générateur d’aliénation, problématise en profondeur l’enseignement-apprentissage du FLES (Français langue étrangère et seconde). Pour s’en sortir, il faut une méthodologie susceptible de répondre à ces spécificités situationnelles dans le sens de réajuster les objectifs à poursuivre ainsi que les stratégies à mettre en oeuvre en vue du traitement adéquat des enjeux de sens et d’identité (socioculturelle) en recourant, dans le cadre de la théorie cognitive, à la conscientisation/prise de conscience des apprenants et à l’activation optimale de la fonction métacognitive par le biais de l’activité contrastive, laquelle relance le rôle de la langue-culture maternelle en classe de français.

Mots-clefs : Interculturalité, exocommunication, asymétries, interférences, aliénation, conscientisation.
Reçu le : 15 mars 2024
Accepté le : 13 juin 2024

Abstract

The exocommunicative intercultural situation with, on the one hand, its abundant asymmetries that are sources of interference and, on the other hand, its unbalanced psychosociolinguistic and axiological dualism generating alienation, deeply problematizes the teaching-learning of FLES (Français langue étrangère et seconde). To get out of this situation, we need a methodology capable of responding to these situational specificities in the sense of readjusting the objectives to be pursued as well as the strategies to be implemented in order to adequately address issues of meaning and (sociocultural) identity, by using, within the framework of cognitive theory, bringing awareness on the part of the teacher/ getting aware on the part of learners and the optimal activation of the metacognitive function through the contrastive activity that revives the role of the mother tongue-culture in the French classroom.

Keywords: Interculturality, exocommunication, asymmetries, interference, alienation, bringing awareness.
Received : March 15th, 2024
Accepted : June 13th, 2024

Introduction

Conceptualisé au beau milieu des années 1970 en France, abondamment théorisé et largement accueilli dans les milieux scientifiques, l'interculturel a fini par être officiellement introduit en Afrique lors d'une rencontre de l’AUPELF organisée à Lomé, en 1982. Il était alors question d’un chantier de recherche de solutions didactiques adéquates pour une juste gestion de l'interculturel africain en enseignement-apprentissage du français langue étrangère et seconde (FLES). Depuis lors, après 30 ans d'incurie, la République démocratique du Congo a pu produire en 2012-2013, sous la houlette d'encadreurs français, la méthode SESAM (Service pour l’éducation, le savoir et l’appui à la maîtrise et à l’usage du français (MS), bien sûr en toute fidélité aux paradigmes du CECRL qui, au fond, véhicule un apport idéologique au profit de la construction de l'Union européenne. Le diagnostic que nous avons effectué de ce rejeton africain du CECRL nous a permis de faire ressortir certaines inadéquations par rapport aux spécificités de l'interculturel négro-africain.

Dans cet article, après une esquisse du champ notionnel de l’interculturel, nous procéderons à la présentation des caractéristiques de l’interculturel africain autour de l’analyse de son principal attribut, à savoir son exocommunicativité, pour terminer par une simple évocation des implications didactiques de ces spécificités en prenant comme référence la Méthode SESAM.

1.0. Notions : l’interculturel et l’interculturalité

L'interculturel réfère à l'espace psychosocioculturel qui se dresse entre des interactants d'origines culturelles différentes, en plein exercice de la fonction sémiotique et de l'imaginaire de leurs langues- cultures respectives. La langue-culture opère comme ‘’catalyseur sémantique’’ (Eco, 1996 : 85), elle fonctionne comme un prisme cognitif et idéologique, ayant ainsi le pouvoir de structurer et de hiérarchiser mentalement non seulement les entités mondaines, mais aussi la personnalité du sujet, en tant que sujet culturel, tout en lui conférant la claire conscience de son identité ainsi que de son équilibre et de son devenir. C'est donc un espace foncièrement problématique et tensionnel, en vertu du croisement conflictuel et confrontatif des univers linguistico-culturels et idéologico-identitaires, des systèmes sémiologiques et axiologiques, des régimes référentiels et inférentiels à l'oeuvre dans le psychisme des sujets communicants.

Cette conflictualité et cette confrontativité tensionnelles comportent un rapport des forces d'ordre cognitif et affectif, et partant, d'ordre métacognitif et méta-affectif que l'activité didactique se doit de gérer pour aboutir à une juste issue.
En situation de communication, notamment celle du traitement didactique de ces macro-actes de parole que sont les textes, l’interculturel est factuellement une réalité multidimensionnelle et protéiforme. Lorsqu’il est appréhendé, saisi et traité sur base de ses contenus situationnels, l’interculturel est pris en charge, dans le jargon de la spécialité, en terme d’ ‘’interculturalité’’.

2.0. Les caractéristiques de l'interculturel africain.
2.1. Horizontalité et verticalité

En situation d'enseignement-apprentissage du français langue étrangère (ou de toute autre langue étrangère), l'interculturalité de l'apprenant peut s’analyser et se structurer en deux axes :

2.1.1. L'axe horizontal où les relations dans les interactions (verbales) s'inscrivent dans une tendance plus égalitariste qu'inégalitariste, un axe où se manifestent plus de ressemblances que des dissemblances dans les produits culturels, plus de convergences que des divergences dans les activités sociales malgré la diversité de tribus, le tout sur base d’un fonds culturel commun africain. Cet axe de l’interculturel horizontal est l’axe de l’endocommunicativité, reliant les communautés ethnoculturelles du pays par leurs dénominateurs communs, sans connotation de hiérarchie.

2.1.2. L’axe vertical où les relations dans les interactions (verbales) s’inscrivent dans une tendance plus inégalitariste qu’égalitariste, avec plus de dissemblances que de ressemblances, plus de divergences que de convergences, notamment dans les atouts civilisationnels techno-scientifiques.

C’est l’interculturel vertical servant d’interface entre l’univers linguistico-culturel africain/congolais (ULC1) et l’univers linguistico-culturel français (ULC2) dans un rapport des forces global favorable à l’Europe au grand dam de l’Afrique. Il s’ensuit alors une relation ‘’haut-bas’’/’’bas-haut’’ qui institue des rapports hiérarchiques de type ‘’donateur vs donataire’’, ‘’dominant vs dominé ‘’,
‘’producteur vs consommateur’’, sans omettre les rapports de type ‘’xénité vs familiarité’’ et ‘’distance vs proximité’’. C’est l’axe de l’exocommunicativité.

2.2. Un espace exocommunicatif

Partant de la notion d'exolinguisme forgée par R. Porquier (1984 :18) pour rendre compte des situations de communication où un des interactants au moins est allogotte, avec une asymétrie importante dans la compétence linguistique (Colletta, 1992 :33) de l'équipe de recherche de L. Dabène avait préféré parler d'exocommunication en vue d'accorder une prépondérance à l’asymétrie des facteurs socioculturels.
Ces asymétries procèdent des cribles lexico-sémantiques, sémio-pragmatiques et idéologico-culturels propres à chaque langue-culture.
Ce qu’il y a de particulier dans l'interculturel africain, c’est que ces asymétries socio-culturelles qui caractérisent l’exocommunication se prolongent dans l'imaginaire et les phantasmes générés par la dominance de la macro-situation techno-scientifique et civilisationnelle occidentale, donnant ainsi lieu à une ‘’méta-affectivité’’ qui, historiquement, est le principe actif de la crise identitaire du négro-africain. Cette ‘’méta-affectivité’’ surplombe et évalue, soit positivement, soit négativement l’’’affectivité de base’’ ancrée au terroir, provoquant ainsi le dualisme psychosociolinguistique et axiologique déséquilibré de l’Afrique.

A l’échelle historico-socioculturelle globale de la rencontre du négro-africain et de l’Européen avec leurs cultures respectives, qu’on s’en souvienne, l’Européen, usant et abusant de la logistique et de l’art de la guerre, s’est attribué la vocation de ‘’recréer’’ le négro-africain ‘’à son image’’ par une rééducation aux valeurs européennes au détriment des valeurs négro-africaines.
A cause des asymétries et des discontinuités interculturelles et surtout du mode impositif de la transmission de ces valeurs dans un rapport des forces culturel et psychologique inégalitariste, cette rééducation a été ressentie comme un choc et a exercé une profonde ‘’violence symbolique’’ sur le négro-africain, entraînant l’ébranlement de ses repères existentiels, éthiques et cosmologiques, jusque-là tenus pour légitimes, vrais et justes.
Tout naturellement, comme par une homéostasie psychologique face au mal-être identitaire issu de cet ébranlement, le négro-africain s’est repositionné dans les profondeurs de son âme pour une ‘’résistance’’ en vue de sauvegarder son identité culturelle. Il en résulta alors un dualisme linguistico-culturel, mais un dualisme déséquilibré se traduisant dans le tréfonds du psychisme par un écartèlement qui, malgré la résistance, a déstabilisé, déboussolé, précarisé et vulnérabilisé la posture idéologico-identitaire du négro-africain.

D’où une situation sociolinguistique de ‘’bilinguisme ‘’(‘’composé’’ ou ‘’coordonné’’), se décrivant, en vertu de la spécialisation fonctionnelle des langues congolaises et de la langue française, en termes de ‘’triglossie’’ (Sesep, 1987 :110), ou de ‘’diglossie’’ où
- d’un côté, la langue française est langue officielle, langue de prestige, de promotion socioprofessionnelle, d’ouverture au monde et à la civilisation moderne. Langue des fonctions sociales supérieures, le français est donc considéré comme une langue supérieure ;
- de l’autre côté, les langues congolaises qui demeurent confinées dans les fonctions sociales subalternes.

En outre, parlant spécialement du contact des cultures, cette diglossie correspond à une ‘’dinomie’’(Séville-Troike, 1982 : 46.).
De nos jours encore, la situation sociolinguistique congolaise n’est encore que la projection de la situation sociolinguistique coloniale (Sesep, 2009).
Sur le terrain, l’étude du répertoire linguistique des locuteurs congolais montre dans les extrêmes, d’une part, une aristocratie intellectuelle qui tient à la langue française, y recourt de temps en temps selon les convenances du domaine référentiel et de la situation de communication et, d’autre part, des masses incultes qui se satisfont de leurs langues maternelles avec, malgré tout, un attrait pour le français. L’emboîtement de la double diglossie macrosociolinguistique congolaise est telle que, sur le terrain microsociolinguistique ‘’in vivo’’, les frontières domaniales des langues en contact accusent une forte porosité, à voir le jeu facilement réversible des alternances codiques (Sesep, 2009).
Il est, également intéressant de noter que V. Matumele Maliya, après une étude statistique des langues utilisées à la Fonction publique, est arrivé à conclure que ‘’les langues nationales sont les plus employées dans le milieu professionnel zaïrois (congolais). Le français vient au second plan sauf dans les documents écrits où le français, comme langue officielle, conserve une position monopolistique (Matumele, 1987 : 188). Parlant de l’Africain, en général, Haddad Adnan (1987 : 22) ajoute que,’’ quel que soit l’éclat de son intellectualité, comportant souvent une bonne maîtrise de la langue de Voltaire, ce n’est que du vernis qui n’altère en rien l’essence du bois dont il est fait.’’
Toujours est-il que, dans la représentation collective, la hiérarchisation des trois niveaux des langues reste intacte, le français occupant le sommet de l’édifice sociolinguistique, les langues véhiculaires le milieu et les langues vernaculaires le rez-de-chaussée, voire la cave pour certaines d’entre elles (Sesep, 2009).

A la fois maître d’oeuvre et maître d’ouvrage de cet édifice sociolinguistique, l’Européen tient à se maintenir dans sa position de domination par diverses formes d’’’agir stratégique’’ (Habermas, 1987a : 198) pour promouvoir sa langue, sa culture, sa vision du monde et, en fin de compte, ses intérêts.

Sur le terrain de l’acquisition et de l’apprentissage du FLES, l’enfant en voie de socialisation hérite de manière infuse d’une structure psychosociolinguistique dualiste, laquelle, tout en faisant exercer sur lui la pesanteur du terroir, va lui conférer au plan psychologique l’attrait irrésistible, ressenti comme naturel, de la langue-culture française, comme un atout prestigieux et un instrument de réussite sociale. L’enfant se trouve donc submergé dans un univers socioculturel en fin de compte extravertissant et déculturant-acculturant.
Dans le cadre scolaire congolais, à titre exemplatif, ce processus aliénant est formalisé et renforcé par le caractère traditionnellement ‘’magistro-centré’’ de l’enseignement-apprentissage de la LCF, l’enseignant jouant au prototype du sujet culturel français et s’imposant comme un modèle. Ainsi, ce dualisme psychosociolinguistico-culturel, avec toutes ses dimensions superstructurelle et infrastructurelle, se trouve sublimé et toujours reconduit par l’école, selon la théorie bourdieusienne de la reproduction sociale.
En outre, l’analyse de la conflictualité et de la confrontativité des ‘’univers linguistico-culturels’’ (ULC) en contact dans cet espace interculturel dualiste, à savoir l’univers des langues-cultures congolaises (ULC1) et l’univers de la langue-culture française (ULC2), tel que nous l’effectuons en termes de ‘’schémas de forme et de contenu ‘’( Carrell, 1990 : 17) , voire de ‘’schèmes cognitivoaffectifs ‘’, fait que l’exocommunicativité de l’interculturel africain en didactique du FLES et, en général, dans la communication sociale, se caractérise par d’abondantes et de profondes asymétries, lesquelles produisent des phénomènes d’interférences et activent des phénomènes d’aliénation, en vertu du ‘’rapport des forces affectif ou méta-affectif’’. Effectivement,

elles produisent des phénomènes d’interférences qui consistent en une ‘’intégration assimilante’’ des schémas de forme et de contenu émanant de l’ULC2 dans la base neurophysiologique de l’ULC1 en vertu des propriétés autostructurantes du cerveau.
Psychososiolinguistiquement, c’est un phénomène de ‘’résistance’’ face à l’intrusion des valeurs appartenant à l’ULC2.
Sa rétroactivité (ULC1   ULC2) en situation d’enseignement-apprentissage d’une langue étrangère s’explique par le rapport des forces affectif foncièrement favorable à la langue-culture maternelle (ULC1 > ULC2).
Ces interférences se produisent au plan du signifiant et du signifié, qui est le plan de la lecture au premier degré, et, surtout, au plan de l’implicite, celui de la lecture au deuxième degré, qui est le niveau le plus opérationnel dans la communication vivante.
C’est pourquoi, au niveau du sens (implicite), à propos des enjeux relevant de l’exocommunicativité dans l’interculturel africain, nous parlons plus d’’‘’enjeux sémio-pragmatiques’’.
Ces enjeux, en problématisant la perception des implicites, qui constituent le niveau le plus pertinent de la communication vivante, tendent à travestir en profondeur l’intercompréhension entre les sujets appartenant à l'un et à l'autre pôles linguistico-culturels au risque même d’induire les interactants dans l'incommunicabilité.

elles activent des phénomènes d’aliénation identitaire, tels que les préjugés, les (auto- et hétéro-) stéréotypes, les complexes (d’infériorité), le psittacisme, le servilisme, la présomption de la meilleure qualité pour tout produit européen et diverses autres associations conditionnelles S-R arbitraires et contingentes concernant notre regard sur nous-mêmes et nos langues-cultures, sur l’Autre et tout ce qui se rapporte à l’altérité, dans un rapport des forces favorable à la ‘’métaaffectivité’’ européaniste. Dans les cas extrêmes, cela peut conduire jusqu'au déni du dialogue des cultures.

Dans cette approche, l’aliénation peut se définir comme ‘’une captivité de la conscience identitaire dont l’ipséité se trouve embrigadée, subjuguée par une instance altéritaire à cause des contraintes macro-situationnelles ou d’une méta-affectivité extravertissante’’ (Mbunda, 2009 : 116). Il s’agit ici d’’’enjeux idéologico-identitaires’’.
Ces enjeux sémio-pragmatiques et idéologico-identitaires fonctionnent sous le mode plus de l’inconscient que du conscient ou, le plus souvent ? sous le mode de la ‘’fausse conscience’’.
Etant donné l’inadéquation, l’inefficience et l’inefficacité de la gestion didactique de ces délicats et pluriels enjeux sémio-pragmatiques et idéologico-identitaires qui sont partie prenante du phénomène de l’exocommunicativité de l’interculturel africain, notamment dans le bilinguisme et, en l’occurrence, dans le bilinguisme scolaire (Cam et Leboul, 1976 : 2.), les effets sur le processus acquisitionnel s’avèrent mitigés (Nyembwe, 2006 : 191), voire médiocres surtout que le système scolaire dans son ensemble se trouve en détresse.

Dans une enquête menée sur la compréhension de 15 textes auprès de 1366 élèves du dernier cycle du secondaire à Kinshasa avec la collaboration respective de 20 professeurs dispensant leur cours de FLES en méthodologie traditionnelle, les résultats obtenus sont les suivants : sur 1423 réponses aux questions visant le « sens explicite » et, également, 1423 réponses aux questions visant le « sens implicite », c’est-à-dire 2846 réponses au total, nous avons établi les pourcentages ci-après :
- en ce qui concerne le sens explicite, 4,5 % de réponses correctes, 36 % de réponses plus ou moins correctes et 58 % de réponses incorrectes ;
- en ce qui concerne le sens implicite (culturel), 3 % de réponses correctes, 12,7% de réponses plus ou moins correctes et 84 % de réponses incorrectes1.

Concomitamment, la même enquête a demandé aux apprenants de s’exprimer sur les images/représentations qu’ils se faisaient, d’une part, de leurs LCM et, d’autre part, de la LCF, en même temps que de leur perception du rapport des forces entre ces langues-cultures en contact. Les résultats étaient les suivants :
-71, 22 % d’élèves ont une représentation positive de la LCF contre 8,4 % porteurs d’une représentation négative ; 31,99 % ont une représentation positive de leur LCM contre 49,85 % porteurs d’une représentation négative.
Le pourcentage restant, 18, 81 %, est celui d’élèves écartelés entre les deux pôles.

A propos du rapport des forces, la majorité de ces élèves le considère comme favorable à la LCF.
Ces chiffres sont les symptômes des contre-performances résultant de la pratique des méthodes situationnellement inadéquates. Du point de vue du profil des élèves, on peut même dire que ces contre-performances sont les conséquences du ‘’bilinguisme composé’’ qu’acquièrent les apprenants dans un enseignement-apprentissage inattentif aux effets insidieux de l’exocommunicativité de la situation d’enseignement-apprentissage qui est celle de l’interculturel africain, avec les enjeux à la fois de sens et d’identité qui le constituent.
Dans cette situation, l’enseignant africain de français, avec son statut de locuteur alloglotte de cette langue-cible, ne pense souvent pas et/ou arrive difficilement, faute d’une formation interculturelle adéquate, à l’exploitation contrastive de la dimension culturelle du texte, ce qui entraîne nécessairement un manque à gagner dans la construction de la compétence interculturelle et pragmatique de l’apprenant, voire dans la compréhension-interpétation tout court.

3.0. Les implications en didactique du FLES

De cette situation d’enseignement-apprentissage du FLES située sur l’axe vertical de l’interculturel africain, tel que nous venons de le présenter avec son exocommunicativité marquée par la délicatesse et la pluralité de ses enjeux sémio-pragmatiques et idéologico-identitaires, il se déduit les options didactiques/méthodologiques ci-après :
- à titre d’objectifs à poursuivre dans la didactique interculturelle du FLES, il est question de restructurer le dualisme psychosociolinguistique déséquilibré (générateurs des phénomènes interférentiels et aliénants) qui, au cours de la socialisation, s’est imprimé dans le mental de l’apprenant. En fait, il est question de convertir le ‘’bilinguisme composé’’ en ‘’bilinguisme coordonné’’ ;

- particulièrement avec le mode inconscient du fonctionnement de la plupart des processus profonds d’acquisition d’une langue (étrangère), notamment ceux du fonctionnement des représentations sémio-pragmatiques et idéologico-identitaires au coeur de l’interculturel africain, la prise de conscience de ces phénomènes s’impose pour leur traitement efficient. Ainsi, dans la didactique interculturelle du FLES et des langues étrangères, en général, on ne pourra jamais trop insister sur l’importance de la conscientisation dans le rôle attendu de l’enseignant.

3.1. Des objectifs de l’enseignement-apprentissage du FLES

Dans les ‘’Fiches Pédagogiques’’ modèles de la Méthode SESAM qui se veut ‘’interculturelle’’, les objectifs sont formulés en termes de thèmes propres à une étude sociologique, anthropologique ou historique. En fait, ces objectifs sont plus socioculturels qu’interculturels.
Toutefois, la MS opère un dépassement en explicitant ces objectifs en termes de ‘’savoir-être’’ et de
‘’savoir-apprendre’’. Malheureusement, elle les circonscrit exclusivement dans la situation d’apprentissage.

Pour entrer de plain-pied dans la didactique interculturelle du FLES, les objectifs doivent converger vers le reformatage psychologique de l’apprenant pour faire de lui un ‘’sujet interculturel’’, c’est-à-dire apte aux plans discursif, moral et éthologique, à faire montre d’ouverture à l’altérité sans se saborder dans son identité, autrement dit apte à se découvrir et à se développer davantage face aux différences affichées par les autres, le tout dans une perspective de citoyenneté nationale et internationale. De la même manière que, dans une tradition multiséculaire depuis le 17ème siècle, l’éducation, particulièrement dans l’enseignement des langues, s’employait à former un ‘’honnête homme’’, de nos jours, à l’heure de cette mondialisation globalisante, l’UNESCO recommande la formation des ‘’ citoyens du monde’’ dotés des ‘’compétences interculturelles’’ qui permettent le ‘’vivre ensemble’’ et, pourquoi pas, l’’’agir ensemble’’ avec - et non pas malgré- nos différences culturelles (UNESCO, 2009). De là à dire que la Méthode SESAM doit faire le pas allant de l’(inter-) culturel à l’interculturel.

3.2. La conscientisation et l’adaptation de la nature et de la stratégie des opérations didactiques

La conscientisation qui, d’une part, répond à un devoir de transparence envers les apprenants et est susceptible de catalyser les facteurs motivationnels et attentionnels, correspond, d’autre part, au besoin d’activer les facultés cérébrales supérieures, notamment la métacognition, pour faciliter la manipulation des représentations. En outre, cette conscientisation, qui doit être la préoccupation principale de l’activité didactique, peut s’effectuer par simple explicitation ou, mieux, par l’activité contrastive.

3.2.1. Activités contrastives, métacognition et manipulation des représentations : pallier le sous-développement métacognitif de la Méthode SESAM

La MS, bien qu’elle se distingue positivement par une abondante actionnalité assortie d’une intense cognitivité, n’a pas pu développer et exploiter l’activité métacognitive qui accompagne tout naturellement toutes les activités cognitives qu’elle a mises en oeuvre. Le questionnement de compréhension de texte comporte à peine quelques questions visant des opérations psycholinguistiques en vue de faire ressortir des relations entre des représentations et des éléments du dispositif indiciel du texte. Dans de rares occurrences, on a pu percevoir dans les questions une portée métacognitive à l’état inchoatif. Dans l’ensemble, nulle part on n’a décelé des questions portant une préoccupation pour le dévoilement des processus inférentiels allant des indices aux représentations.

De là à pouvoir dire que la MS souffre déplorablement d’un ‘’sous-développement métacognitif’’ causant un déficit dans la poursuite des objectifs interculturels, surtout en ce qui concerne les enjeux de l’émergence et de la circulation du sens ainsi que les enjeux du devenir identitaire avec toute sa particularité dans la situation de l’Afrique. Pour pallier un pareil phénomène, en général, le travail didactique doit consister à développer et exploiter la fonction métacognitive en partant d’une activité contrastive.
Contrairement à l’analyse contrastive purement linguistique de R. Lado (1957), jadis utilisée pour une programmation dite ‘’aseptisante’’ des contenus du cours dans la méthodologie structuro-behavioriste l’activité contrastive requise dans ce cadre est anthropologico-culturelle : elle s’appuie sur une analyse sémiologique des items conceptuels de ULC1 et U LC2, tout en procédant à une comparaison pour dégager des ressemblances et des différences, des convergences et des divergences. Il va s’y produire des ‘’processus en miroir’’ (Abdallah-Pretceille,1999b: 68) qui vont amplifier l’activité métacognitive, donnant ainsi lieu à des ‘’métareprésentations’’.

Il revient alors à l’enseignant de développer, par des apports exprès et adéquats d’informations manquantes, le processus allant des activités contrastives au traitement des métareprésentations dévoilées par les productions verbales des apprenants. Ces apports d’informations manquantes seront oppositionnels, promotionnels ou relativisants, selon l’objectif requis par le cas en cours de traitement. Ces métareprésentations fonctionnent comme des plateformes où se croisent et se traitent les représentations sémio-pragmatiques et idéologico-identitaires remises en cause.
Il est impérieux de noter que, dans la démarche allant des activités contrastives jusqu’à la manipulation des représentations, l’enseignant doit rester ancré et ancrer les apprenants dans ‘’la coopération textuelle’’ pour éviter toute ‘’dérive’’ au-delà de ce que U. Eco (1992 : 198) appelle les ‘’limites de l’interprétation’’.
Il importe de noter également qu’il s’agit ici des phénomènes cognitifs, donc immédiatement inaccessibles et inobservables, ne pouvant être traités qu’à travers leurs verbalisations par les apprenants et l’enseignant lui-même.

3.2.1.1. Du traitement des représentations sémio-pragmatiques

Une fois les représentations placées face à face au cours de l’activité contrastive, l’’’effet abstractif’’.
(Bouton, 1974 : 106) des processus métacognitifs réalise, d’une part, l’intégration des traits communs et, d’autre part, la discrimination des traits différenciateurs, donnant ainsi lieu à une ‘’intégration discriminante’’ (Bouton, 1974 : 109) qui opère la déconstruction des interférences et, ce faisant, la (re)construction des représentations distinctes et correctes.
Partant des thèses et antithèses interprétatives de départ, l’’’intégration discriminante’’ réalise ici un passage des « synthèses dialectiques’’ (hégéliennes) à des ‘’synthèses dialogiques’’ (socratiques) que E. Morin (1990: 99), dans son épistémologie de la complexité, appelle ‘’unitas multiplex’’, autrement dit l’’’unité dans la diversité’’ qui doit être de mise dans la relation interculturelle verticale entre l’ULC1 et l’ULC2.

A la longue, c’est ce mécanisme qui permettra l’installation dans le système cognitif de l’apprenant d’un ‘’lecteur différentiel’’ (Van Vlasselaer, 1998 : 98) et partant l’acquisition du ‘’bilinguisme coordonné’’. Le lecteur différentiel est un dispositif du système neurocognitif permettant des commutations paramétriques pour permettre au sujet de passer mentalement d’une situation de communication à une autre. Le fonctionnement de ce dispositif permet à l’apprenant de prendre conscience du fait
- qu’il peut, en toute légitimabilité, comprendre un texte autrement que son auteur
- et que d’autres lecteurs peuvent aussi le comprendre selon eux-mêmes, d’autant plus que, dans certaines semiosis particulières, la magie ou l’archéologie du verbe, soit génèrent dans le texte des ‘’sens opportunistes’’ imprévus par l’auteur, soit réveillent des ‘’sens endormis’’.

En tout cas, la didactique interculturelle nous éloigne nécessairement du ‘’totalitarisme interprétatif ‘’ de la tradition méthodologique pour faire prévaloir plutôt la singularité de l’émergence du sens en vertu des spécificités du capital cognitif de chaque lecteur et de sa ‘’repragmatisation’’ du texte en rapport avec son expérience existentielle.

3.2.1.2. Du traitement des représentations idéologico-identitaires

Toujours sur l’axe vertical, concomitamment avec le traitement du sens, les ‘’métareprésentations’’ liées à l’’’effet abstractif’’ des processus métacognitifs entraînent la possibilité de se distancier de soi (psychologiquement, moralement) , de se décentrer , de se remettre en question, de se positionner dans une posture relationnelle et relativiste : autant de valeurs éthiques, socio-relationnelles découlant de la didactique interculturelle des langues étrangères. Tout comme pour la déconstruction-reconstruction des représentations sémio-pragmatiques, ce sont les discour oppositionnels, promotionnels et relativisants bien orchestrés et bien administrés qui, en dévoilant et en récusant l’arbitraire et la contingence de certaines associations conditionnelles d’ordre sociorelationnel, permettent de démonter des préjugés, des (auto- et hétéro-) stéréotypes, des idées préconçues, des complexes d’infériorité qui sont les marques d’aliénation linguistico-identitaires du négro-africain.
En contexte d’exercice de compréhension de texte, ce traitement peut s’effectuer valablement sur l’axe horizontal et endocommunicatif du groupe-classe par le biais d’échanges et de débats sur, par exemple, l’illocutoire dominant du texte ou de différentes entités subtextuelles.

En somme, les discours oppositionnels, promotionnels et relativisants si importants dans la résolution de ces enjeux sémio-pragmatiques et idéologico-identitaires s’appuient sur des apports d’informations (culturelles) manquantes, notamment les ‘’schèmes cognitivo-affectifs’’ (‘’Schémas de contenu et de forme’’) de l’ULC2, l’enseignant étant supposé connaître suffisamment la langue-culture française. C’est grâce à une analyse componentielle contrastive des représentations des apprenants, analyse à effectuer par le biais d’une ‘’analyse sémique’’ (des mots-clés) de la verbalisation que les apprenants eux-mêmes en font qu’il devient possible de décrypter et ramener à leur claire conscience les schèmes cognitivo-affectifs à l’oeuvre dans les phénomènes interférentiels et d’aliénation. Ainsi, au lieu de simples correspondances psycholinguistiques souvent sollicitées des apprenants dans la MS entre idées et éléments du dispositif indiciel du texte, il sera question ici que les apprenants reconstruisent les parcours cognitifs allant des indices textuels ou des ‘’réalités mondaines ‘’ aux représentations en passant par les ‘’cribles’’ psychoculturels d’où émanent les processus inférentiels qui donnent lieu à ces représentations.

3.2.2. L’affectivité dans les processus cognitifs : pallier la non-focalisation de la charge affective dans la Méthode SESAM

Toute activité cognitive s’accompagne toujours d’une charge affective (Damasio, 2003 : 26), laquelle intervient
- comme catalyseur des processus motivationnels et attentionnels pour soutenir le processus acquisitionnel
- comme partie prenante dans les configurations que peuvent prendre les représentations.
Dans le traitement de la problématique interculturelle, l’affectivité intervient dans la manipulation (par déconstruction-reconstruction) des représentations interférentielles en vertu de ses propriétés dynamogénératrices

avec effets, soit fissionnel, soit fusionnel (Damasio, 2003 :148), selon la direction donnée par la mise en perspective ou la mise en projet imprimées par l’enseignant.
Ces opérations de manipulation des représentations interférentielles requièrent toujours une focalisation expresse de la mobilisation affective sur les zones et les moments d’asymétries interculturelles et de croisements indus et vicieux des schémas cognitifs.
Dans la Méthode SESAM, la mobilisation affective, très intéressante dans sa fonction suggestologique (Racle, 1977 : 211) semble pourtant aléatoire par rapport à sa vocation spécifique dans le traitement des enjeux interculturels.

3.3. De la nécessité de passer de la conception ontologique à la conception constructiviste du sens

Dans la Méthode SESAM, la consultation des grilles des questionnaires relatifs aux activités de compréhension, globale et détaillée, conduit à l’évidence de la prédominance de la recherche du sens explicite sur la recherche du sens implicite ainsi que de la mise en oeuvre des savoirs déclaratifs sur la mise en oeuvre des savoirs procéduraux et conditionnels, en même temps que, dans le questionnement visant la compréhension, la prédominance des verbes qui supposent que le sens est une réalité extérieure, voire antérieure au sujet , par exemple ‘’saisir’’, ‘’appréhender’’ ; ‘’accéder à ‘’, etc…
Cette option, qui relève de la conception ontologique du sens et qu’on retrouve dans la sémantique de la référence et dans la sémantique structurale, considère le sens comme une ‘’réalité hors-sujet’’, voire ‘’antérieure au sujet’’. Ici, le sens est toujours abordé comme une ‘’ relation signifiant/signifié’’. Nonobstant l’arbitraire du signe, il est considéré comme du ‘’pré-fabriqué’’. De ce fait, elle ne peut pas être opérationnelle dans le traitement des enjeux interculturels dans lesquels sens et identité s’imbriquent.
Cette imbrication du sens et de l’identité requiert le dépassement de la conception ontologique du sens en faveur de la conception cognitive et constructiviste selon laquelle le sens est une construction, une résultante d’une transaction multilatérale qui n’existe que dans le système cognitif du sujet.

Enfin, cette approche cognitive et constructive disqualifie la traditionnelle notion de ‘’compréhension globale’’ suivie de la ‘’compréhension détaillée’’ dans l’exercice scolaire de compréhension de textes, et cela dans la mesure où le qualificatif ‘’global’’ veut dire ‘’essentiel’’ ou ‘’d’ensemble’.
Effectivement, dans la situation exocommunicative qui est la nôtre, compte tenu, d’une part, de la compétence linguistiquement et culturellement infrasystémique de l’apprenant et, d’autre part, des asymétries que cette situation comporte, il est naïf de travailler dans la présomption que l’apprenant peut s’approprier dès la première lecture l’essentiel du contenu d’un texte.
L’exocommunicativité de notre situation interculturelle, avec ces abondantes asymétries, facteurs d’abondantes interférences, impose, dans l’exercice de la compréhension de texte, de travailler sur base de la présomption d’une compréhension partielle et imparfaite du texte. La compréhension est un processus progressif et cumulatif, un processus néguentropique, allant de l’entropie maximale vers l’entropie minimale.

Il est donc légitime que, en interculturel, les ‘’infélicités interprétatives’’ soient les ‘’matières premières’’ du travail didactique et qu’elles soient accueillies par l’enseignant tout en sachant que
‘’accueillir’’ ne signifie pas ‘’accepter’’. Que soit alors bannie la phobie skinnérienne de l’erreur, en accordant à l’apprenant le droit à l’erreur.
Dans cette situation, c’est l’approche cognitive et constructive qui propose la solution idoine par rapport à la réalité de la situation interculturelle d’enseignement-apprentissage du Français langue étrangère et seconde (FLES).

4.0. De l’interculturel horizontal : plurilinguisme et plurilingualité

Outre ces quelques implications didactiques relatives aux spécificités de l’axe vertical de l’interculturel, axe de l’exocommunicativité ULC1-ULC2, il importe que soit également tenu compte, sur l’axe horizontal, axe de l’endocommunicativité, du problème à la fois du plurilinguisme du groupe-classe et de la plurilingualité individuelle des apprenants. La particularité de cette situation est que, en marge du fond ethnoculturel commun, l’apprenant est doté de singularités expérientielles correspondant à un capital cognitif singulier. Ainsi, dans l’exercice de compréhension de texte, l’approche interculturelle exige que l’enseignant renonce au confort du ‘’totalitarisme pédagogique’’ pour respecter et valoriser les singularités interprétatives des apprenants. Et ce par un traitement métacommunicationnel horizontal judicieux, susceptible de conduire toutes les idiosyncrasies interprétatives vers une ‘’synthèse dialogique’’(Morin). C’est pendant ce parcours, essentiellement fait d’échanges et de débats, que l’enseignant va s’employer à fournir aux apprenants les matériaux linguistiques appropriés à l’éthique et au discours interculturels.
Ainsi l’initiation à l’éthique interculturelle ne doit en rien sacrifier l’étude de la langue, mais, bien au contraire, l’enrichir davantage dans un cadre plus motivant.

5.0. De la formation méthodologique interculturaliste de l’enseignant

Le statut de locuteur alloglotte de l’enseignant africain de FLES est souvent considéré comme contreperformant alors qu’il suffit d’une formation méthodologique interculturaliste pour que, au plan de la gestion de la double dimension culturelle de la lecture du texte, ce statut puisse permettre à cet enseignant de supplanter l’enseignant homoglotte. Cependant, la formation de l’enseignant alloglotte du Français langue étrangère et seconde (FLES) en approche interculturelle requiert, outre les cours des disciplines traditionnellement prévues, des cours approfondis en didactique cognitive des langues (étrangères), en pragmatique (cognitive) et en psychologie des profondeurs.

Conclusion

La situation interculturelle exocommunicative africaine impose dans la didactique du FLES des options spécifiques, déjà dans les objectifs à poursuivre, dans les stratégies didactiques qui requièrent une conscientisation/prise de conscience permanente de l’apprenant dans une activation optimale de la fonction métacognitive par le biais de l’activité contrastive, en même temps qu’une posture épistémologique adéquate dans le traitement du sens dans son étroite connexité avec le problème de l’identité culturelle.
Du point de vue de ces spécificités, la Méthode SESAM, dans le giron de la vision européaniste du CECRL, se trouve pratiquement à cheval entre la méthodologie traditionnelle et la méthodologie interculturelle et mérite d’être reconfigurée, par une recherche intense, selon les axes de perfectibilité que nous venons de faire ressortir dans cet article. Dans l’ensemble, le champ de la recherche interculturelle reste ouvert et dynamique bien que largement vacant, faisant appel à plus d’investissement humain en termes de chercheurs, à plus d’investissement matériel et financier, et par-dessus tout, à plus d’autonomie épistémologique.

Bibliographie

- Abdallah-Pretceille, M. (1999b), L’éducation interculturelle, Paris, P.U.F., (Que sais-je ?).
- Bouton, C. (1974), L’acquisition d’une langue étrangère : Aspects théoriques et pratiques, conséquences pédagogiques essentielles, Paris, Klincksieck
- Cam, T.H. et Leboul, M. (1976), Le bilinguisme scolaire au Zaïre, CELTA, Lubumbashi.
- Carrell, P.L. (1990), ‘’Culture et contexte dans la lecture en langue étrangère : Rôle des schémas de contenu et des schémas formels’’, LFDM, RA, n° spécial, Paris, Hachette, pp. 16-27.
- Colletta, J.M. (1991), ‘’De l’exolinguisme à l’exocommunication’’, in Acquisition et enseignement des langues, Grenoble, pp. 32-38.
- Damasio, A.R. (2003), Spinoza avait raison. Joie et tristesse, le cerveau des émotions, Paris, Odile Jacob.
- Eco, U. (1982), Les limites de l’interprétation, Paris, Grasset.
- Habermas, J. (trad. Franç., 1987), Théorie de l’agir communicationnel, T1, Paris, Fayard.
- Haddad, A. (1987), ‘’Bilinguisme et identité culturelle en Afrique : cas du Zaïre’’, in Mitunda, Revue des cultures africaines, vol.II, n°1, Lubumbashi, PUL, pp.4-29.
- Matumele, M. (1987), ‘’Langues zaïroises et administration publique’’, in Kazadi Nt. et Nyembwe Nt..(éds), Utilisation des langues nationales, Linguistique et Sciences humaines, n° spécial, Kinshasa, CELTA, pp.186-190.
- Mbunda Iteka, E. (2009), Enjeux psycho-socioculturels de l’enseignement-apprentissage d’une langue étrangère. Exocommunication et acquisition du sens implicite dans le cours de portugais, Mémoire de D.E.S., Université de Kinshasa, inédit.
- Morin, E. (1990), Introduction à la pensée complexe, Paris, Seuil.
- Nyembwe Ntita, A. (2006), ‘’La formation des enseignants de français en République démocratique du Congo’’, in Annales de la Faculté des Lettres et Sciences humaines, n°V-VI, P.U.K, Kinshasa, pp.191-199.
- Porquier, R. (1984), ‘’Communication exolingue et apprentissage des langues’’, in Py, B. (éd.) Acquisition d’une langue étrangère III, Paris, PUV, pp.17-47.
- Racle, G. (1977), ‘’Apprentissage langagier et facteurs suggestologiques’’, in RPA, n°42/43, Mons, Université de Mons, pp. 211-223.
- Raillard, S. (1995), ‘’Les inconnues de l’acquisition’’, in LFDM, n° spécial, Paris, pp.216-224.
- Saville-Troike, M. (1982), The ethnography of Communication. An Introduction, Oxford, Basil Blackwell and Baltimore.
- Sesep N’Sial, C. (2009), La politique et les langues. De l’Etat indépendant du Congo à la Troisième République, L’Harmattan.
- Vlasselaer, J.J. van (1996), « Apprentissage de la langue, espace interculturel et renforcement de la culture première », in A. LANDERCY, R. RENARD (éds), Aménagement linguistique et pédagogique interculturel, Paris, Didier Erudition/Mons, CIPA, pp.85-95.

Par Emmanuel MBUNDA I-TEKA, dans RIFRA, Presses Universitaires de Kinshasa, 2024