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ENTREPRENEURIAT CULTUREL ET ARTISTIQUE A KINSHASA. DEFIS ET MONDIALISATION
CUTURAL AND ARTISTIC ENTREPRENEURSHIP IN KINSHASA. CHALLENGES AND GLOBALIZATION

G. BARHAKOMERWA FABOU

Résumé

Cette investigation fait un état de lieux et des profils des entreprises culturelles et artistiques dans la ville de Kinshasa, en ressortant les caractéristiques de l’entrepreneuriat culturel et les activités exercées par chaque catégorie d’entreprises. Par ailleurs, l’étude relève aussi les obstacles majeurs inhérents à la création, à l’organisation, au développement de l’entrepreneuriat culturel Kinois et son ouverture au commerce international. Enfin, un lien est établi entre le bénéfice d’un accompagnement à l’entrepreneuriat culturel et se clôture par des recommandations en termes de perspectives entrepreneuriales.

Mots-clés : Entreprises culturelles et artistiques, obstacles majeurs, organisation, développement et perspectives entrepreneuriales.
Reçu le : 16 janvier 2023.
Accepté le : 7 décembre 2023.

Summary

This investigation makes an inventory and profils of cultural and artistic entreprises in the city of Kinshasa, highlinghting the characteristics of cultural entrepreneurship and the activities carried out by each category of companies. In addition, the study also identifies the major obstacles inherent in creation and organization, the development of kinois cultural entrepreneurship and its openness to international trade. Finally, a link is established between the benefit of support for cultural entrepreneurship and ends with recommendations in terms of entrepreneurial prospects.

Keywords : cultural and artistic entreprises, major obstacles, organization, development and entrepreneurial perspectives.
Received : 16 January 16, 2023.
Accepted : December 7, 2023.

Introduction

La dimension culturelle de la mondialisation ne doit pas être confondue avec une hypothétique mondialisation de la culture qui désignerait soit la diffusion élargie de pratiques culturelles, soit l’augmentation des échanges de biens culturels ou encore une uniformisation qui aboutirait à une sorte de culture mondiale. Un marché-monde ne crée pas une société-monde. (…) Les médias sont les principaux vecteurs de la mondialisation culturelle. Aujourd’hui, c’est à travers eux que s’effectuent les rapports virtuels qui affectent une partie sans cesse croissante de l’humanité. La sphère médiatique globalisée ne fait pas disparaître le territoire, mais elle constitue un espace virtuel où se définissent les modèles, les styles de vie, les codes, les héros, les rêves fondés sur des valeurs consuméristes, souvent au plus séducteurs et influents que l’entourage immédiat (Jean Tardif, 2008 : 203).
À en croire les projections de l’hebdomadaire « The Economist » du 17 Octobre 1992, grâce à la libéralisation de la radio et de la télévision et à la commercialisation, la marge de progression du secteur de la culture à l’échelle mondiale serait de l’ordre de 10%, c’est-à-dire plus élevée que beaucoup d’autres secteurs industriels et commerciaux. Les études qualitatives et statistiques de l’OCDE (1998) et de l’APCE (1998) confirment « le nécessaire et évident besoin d’accompagnement des jeunes entreprises et montrent, par ailleurs, que l’accompagnement tous azimuts n’est pas suffisant.
Cependant, le terreau de la création, représenté par « l’écosystème », peut obscurcir la voie de l’accompagnement efficace de par la pléthore de ses composantes et produire l’effet massue au lieu du levier à la création. Il en résulte une nécessaire sélection parmi les organismes d’aide à la création. Cette sélection doit allier impérativement le besoin de suppléer aux insuffisances de compétences du créateur à la représentation personnelle que se fait celui-ci de son entreprise et de sa trajectoire de réussite » (Gérard A. Koukou Dokou, 2001 : 4).
L’entrepreneuriat en général joue un rôle clé dans le développement économique et la richesse d’un pays. La réussite commerciale se traduit par le bien-être économique de l’entreprise et de ses résidents en créant des emplois et en améliorant la qualité de vie des citoyens du pays. Les entreprises artistiques, culturelles et créatives font partie du moteur de la stabilité et de la croissance économiques en fournissant des services, des produits et des recettes fiscales de grande valeur qui contribuent directement à la santé et succès communautaires à travers la création des emplois et le renforcement de l’assiette fiscal et du pouvoir économique de l’entité où l’entreprise est basée.

1. Cadre d’étude et méthodologie

Le cadre de cette étude est une enquête réalisée auprès des 384 opérateurs individuels ou propriétaires des entreprises culturelles opérant dans la ville de Kinshasa, et répartis selon les principales activités culturelles retenues de la manière suivante :

Tableau 1 : Répartition des entreprises en secteur d’activités

Cette enquête vise à contribuer par des auteurs d’horizons variés de croiser les regards, de générer des idées, afin de participer à l’amélioration de l’entrepreneuriat culturel en RD Congo.
Dans son ouvrage intitulé « Rumbissimo (Rumba, Droit et Business)» Yvon Laurier dénonce les maux qui ne favorisent pas l’autonomie de l’artiste» (Yvon Laurier Ngombe, 2013 : 71) alors que Michel Lonoh Malangi (1969 : 35) affirme que « le grand malheur des musiciens congolais se trouve dans le manque d’une législation appropriée pouvant éluder le contact de louage de services des professionnels congolais de la musique. » En effet, le papillonnage des artistes musiciens kinois pose un vrai problème de statut et de production de leurs oeuvres, qui, par ailleurs ne sont pas parrainées parce que aucune certification de protection intellectuelle ne leur est délivrée. En effet beaucoup d’artistes vivent et meurent dans la précarité : leurs unités de production demeurent souvent peu viables économiquement. Leurs organisations entrepreneuriales ne durent que le temps du succès car les responsables d’orchestres sont incapables de maintenir leurs entités musicales dans le temps et surtout de continuer à rémunérer les membres de l’organisation, voire de les professionnaliser.

Ces constats constituent le point de départ et la raison de cette étude relative à la prise en compte des difficultés ou contraintes liées à l’entrepreneuriat artistique et culturel. La dimension managériale et le marketing des entreprises artistiques et culturelles conditionnent l’efficacité des groupes et leur professionnalisation. En effet, comme le déclarent Frédérique Alexandre-Bailly, Denis Bourgeois, Jean-Pierre Gruère et alii, « Une organisation s’inscrit dans un environnement culturel, matériel et immatériel. Elle adopte et construit des normes et des valeurs qui dictent et orientent les comportements de ses membres. Les perceptions des membres d’une organisation sont influencées par les groupes auxquels ils appartiennent (les commerciaux, le comptables, les juristes) et par les modes de socialisation globale proposés ou imposés par l’organisation. L’appartenance organisationnelle influence les perceptions sélectives. Celles-ci peuvent aussi bien aider à la résolution des problèmes (expérience professionnelle, compétences) que limiter le champ des investigations (sectarisme, corporatisme, etc.) » (Frédérique Alexandre-Bailly et alii, 2016 : 37-38). Frédérique Alexandre-Bailly Comme dans la plupart des secteurs de la vie à Kinshasa, la culture et les Arts semblent végéter dans un informel dont les conséquences sont sans appel dans un domaine de débrouillardise institutionnalisée et les artistes voués à une mégestion des talents et d’avenir. Notre investigation constitue une esquisse sur l’entrepreneuriat culturel et artistique kinois en dégageant les contraintes majeures inhibant son émergence et les perspectives d’ouverture au commerce international.

2. Développement et avantages d’une entreprise culturelle

Les entreprises sont directement liées à la santé économique et au bien-être des citoyens de la ville, de la province, du pays, de la région économique et des pays où elles opèrent. Les entreprises prospères sont le moteur de la santé économique, ce qui se traduit par une meilleure qualité de vie des citoyens. Dans beaucoup de pays, ainsi que nous avons pu le relever, les entreprises artistiques, culturelles et créatives sont au coeur de processus du développement.
Elles fournissent des emplois et des richesses : elles produisent des biens et des services nécessaires pour répondre aux aspirations et besoins des populations. Cette contribution éminente de l’entrepreneuriat culturel dépend largement du climat organisationnel et institutionnel de l’investissement instauré par les créateurs et le pouvoir public. L’entrepreneuriat de développement n’est possible que si l’espérance des gains futurs est supérieure à l’investissement initial. Françoise Benhamou dit à cet effet que : « la vie des artistes est ainsi faite qu’elle exige des hommes l’acceptation des incertitudes quant à leur notoriété, le prix d’investissement, les risques au nom des récompenses matérielles et symboliques qu’elle réserve à quelques élus ». (Françoise Benhamou, 2016). Cela étant, l’entrepreneur culturel doit d’abord savoir définir les missions et objectifs à réaliser, élaborer des stratégies, la politique de l’entreprise et mobiliser ensuite des ressources humaines, financières et matérielles suffisantes pour la réalisation du projet. L’entrepreneur culturel doit se doter aussi de capacités de créativité, d’autonomie, de sens managérial, de leadership, du sens de responsabilité et de la solidarité. La santé économique de la province peut s’observer par le flux de création des unités économiques, en plus de l’offre d’énormes opportunités pour sa diversité. Les communautés et les pays qui encouragent la création et le développement de nouvelles entreprises obtiennent des avantages pour leurs citoyens et leurs résidents grâce aux produits et services fournis par les entreprises en faveur de la communauté. La diversification économique signifie moins de dépendance à l’égard d’une entreprise ou d’un secteur particulier et permet à la province de mieux résister aux hauts et aux bas normaux associés au cycle économique. Un climat favorable offre aux promoteurs des entreprises les meilleures conditions de création : des opportunités et des mesures incitatives en vue d’investir à des fins productives, créer des emplois et de développer des activités sur le plan local, national et international constituent d’autres avantages inéluctables de ce domaine culturel et artistique. La doctrine de l’exception culturelle repose sur le principe que les biens et les services culturels, du fait de leur relation à la culture, sont d’une nature particulière qui va au-delà des seuls aspects commerciaux. Ils véhiculent des contenus, des valeurs et des modes de vie faisant partie prenante de l’identité culturelle d’un pays et reflètent la diversité créatrice des individus.

La contradiction économique majeure à laquelle sont confrontés depuis toujours les entrepreneurs du secteur artistique, culturel et créatif, tient à ce qu’ils sont de plus en plus soumis logiquement à des ambitions de création artistique et culturelle et à la logique de production industrielle assortie de rentabilité matérielle et immatérielle. De ce fait, ils sont obligés d’osciller entre la sphère artistique, intellectuelle, la sphère marchande et la production matérielle ou la production symbolique. Toutes ces diverses contraintes entrepreneuriales imposent la prise en compte des risques considérables pour fonctionner selon les règles des marchés internes et externes. Cependant, les normes de valorisation d’une création artistique ne sont pas saisissables exactement de la même manière compte tenu des facteurs quelquefois subjectifs et non quantifiables intervenant dans le procès de création. Le temps et les sources d’approvisionnement de l’artiste sont vraiment imprécis à cause du caractère informel de son travail. Bien plus, les mécanismes de l’offre et de la demande fonctionnent différemment. Un des exemples le plus simple est celui d’une oeuvre d’art vendue à un prix inimaginable par son créateur : « le cas du "masque d’initié Lukungu" du 19ème siècle en ivoire patine rouge sombre de l’ethnie Lega en RD Congo, présenté à la Maison des ventes aux enchères parisiennes. Il a coûté 2,4 millions d’euros, un record mondial. Un exemple aussi clair sur la considération économique de l’oeuvre d’art suppose qu’elle soit sensée contenir des valeurs propres et stimulantes pour les collectionneurs ou amateurs d’art. » (Kouéna Mabika Louis, 2005 : 4). En effet, « l’ensemble des valeurs propres associées aux oeuvres d’art sont: la valeur sociale ou utilitaire, la valeur esthétique, la valeur cognitive et la valeur de prestige qui est relative au temps et à la renommée de l’artiste ». Par ailleurs, au-delà de la simple volonté d’entreprendre culturellement et de la simple capacité à réunir des ressources nécessaires et des compétences particulières pour réaliser des projets d’entrepreneuriat culturel et créatif, l’environnement socioculturel, politique et économique, propice, peut contribuer fortement au développement, au succès d’une oeuvre d’art ou culturelle. A contrario, ces mêmes éléments peuvent constituer l’origine de l’échec, de l’entrave aux initiatives de la création et de l’ouverture à l’international. Au regard de cette évidence, aux spécificités et aux nombreuses difficultés liées à l’entrepreneuriat culturel, en RD Congo, on éprouve des contraintes pour la création, la réalisation et de surcroit l’ouverture pour l’intégration de l’entrepreneuriat culturel congolais au niveau du commerce international. Les contraintes sont nombreuses qui rendent difficiles l’évolution de l’art et l’exportation de la culture, des arts congolais parce qu’il y a par ailleurs un calibrage des oeuvres par rapport aux standards internationaux.

3. Contraintes et freins au développement d’une industrie culturelle à Kinshasa

Kinshasa est la mégapole de la RDC regorgeant à elle seule une grande concentration des activités entrepreneuriales culturelles du Pays. La ville de Kinshasa, ancienne Léopoldville jusqu’en 1966, est la capitale de la RD Congo. Elle est une entité administrative décentralisée ayant à la fois le statut administratif de ville et de province et dispose d’une administration urbaine, forte de 24 communes, qui sont les entités de base constitutives de la ville. Selon le Ministère du Plan, « la ville de Kinshasa n’est dotée d’aucune richesse naturelle exceptée sa biodiversité. » (DSCRP, 2011, p.4) Pourtant une réalité contradictoire quand l’on considère la biodiversité comme faisant partie des ressources naturelles et celles-ci comme étant des stocks de matières présentes dans le milieu naturel qui sont à la fois rares et économiquement utiles pour la production ou la consommation quel que soit son état (exploité ou pas).
Sur le plan socioéconomique, le PNUD souligne que « la pauvreté est importante à Kinshasa (41,6 %). Avec le déclin de l’emploi fixe, le secteur informel non agricole est très développé et constitue le principal pourvoyeur d’emplois. Si on agrège l’ensemble des revenus d’activités des ménages, on obtient un revenu moyen par ménage de 84$. Comme le marché du travail est dominé par le secteur informel, il s’ensuit que 89 % du revenu des ménages de cette ville sont issus de ce secteur. 6,1 % proviennent du secteur public et enfin la contribution du secteur privé formel est réduite à 4,4 % du revenu total des ménages. » (PNUD, 2013, p.8).

Paradoxalement, on a l’impression que la présence des institutions gouvernementales nationales et provinciales participent à la croissance de certains obstacles majeurs liés au développement de l’entrepreneuriat artistique culturel et créatif à Kinshasa. À côté des difficultés de taille liés à l’organisation technique et financières des entreprises culturelles ; le bicéphalisme dans le prélèvement des taxes et impôts en faveur de certaines régies financières semble entrainer de nombreuses contraintes d’ordre social et administratif tel que la corruption et l’évasion fiscale. Point n’est besoin de rappeler la carence d’infrastructures publiques. Alors que certains produits artistiques, culturels et créatifs mondiaux s’affranchissent des frontières, des coûts sociaux et des contraintes juridiques comme financières, accompagnent nos entreprises culturelles.
Pour en conclure, la RDC est caractérisée par un déficit de données sur les marchés à l’import et export en plus de l’absence de la facilitation et les spécificités administratives et fiscales locales, le manque de visibilité sur les grands projets et les événements majeurs à l’international, le morcellement des dispositifs de soutien, parfois peu lisibles pour les acteurs, la difficulté à mettre en place une stratégie coordonnée à l’importation et à l’exportation (contrairement à la concurrence étrangère) et l’absence d’attractivité des entreprises apparaissent comme des freins notables.

4. Population cible de l’étude

Préciser la population cible de l’étude s’impose à nous comme le propose Jaeger « pour déterminer un champ d’étude unique, il faut une définition théorique unique de cet ensemble ». (JAGER G., 1982 : 11). En ce sens, concernant la population cible de notre étude, nous nous sommes intéressé aux entrepreneurs culturels kinois répondant aux quatre critères suivants : - être entrepreneur culturel ou responsable (gestionnaire) de l’entreprise culturelle, -être créateur d’oeuvres d’esprit conçues à but lucratif ou non lucratif. – exercer une activité culturelle d’une notoriété sans conteste à un seuil acceptable dans l’opinion publique, et – exercer une activité culturelle appartenant à une des catégories suivantes : musique, théâtre, média, livre, prestation de service, arts plastiques et graphiques.

5. Résultats sur l’entrepreneuriat culturel à Kinshasa (RD Congo)

Voici les données, les tableaux et graphiques issus de notre enquête.

5.1. Profil des répondants

Tableau 2 : profil des répondants

Sexe

Fréquence

%

Homme

296

77,1

Femme

88

22,9

Total

384

100

Etat matrimonial

Fréquence

%

Célibataire

187

48,7

Marié

197

51,3

Total

384

100

Possession d’une entreprise culturelle

Fréquence

%

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

  Non                                                                   255             66,4

  Oui                                                                    129             33,6

  Total                                                                 384             100

Voici les données, les tableaux et graphiques issus de notre enquête.

7.2. Interprétation des tableaux croisés

Les résultats de l’enquête démontrent que l’essentiel des répondants était des hommes. 197 sur 384 enquêtés sont mariés, soit 51,3% contre 48,7% des célibataires, atteste le tableau 2. Les répondants ont au moins un diplôme d’études secondaires : 53,6% pour les études supérieures, 13% ont un niveau professionnel et 33,3% ont un diplôme d’études secondaires, révèle le tableau 3 : Ceci prouve que les enquêtés ont un certain niveau de connaissances et sont conscients de leur position en matière entrepreneuriale.

La plupart des répondants ne sont pas propriétaires des entreprises culturelles enquêtées : soit 66,4% contre 33,6% propriétaires d’entreprises, comme l’indique le tableau 2. Néanmoins les répondants non-propriétaires d’entreprises ont été mandatés, en qualité de gestionnaires, pour des raisons techniques par les propriétaires d’entreprises. Ainsi, la répartition des différentes fonctions assumées au sein de l’entreprise par les répondants fait un état de 38,5% des fondateurs ou des co-promoteurs, 29,4% des gestionnaires alors 37,0% occupaient d’autres fonctions au sein de l’entreprise. Les femmes sont moins intéressées à la gestion des entreprises culturelles, au vu du croisement entre le sexe et la fonction au sein de l’entreprise culturelle. Il se révèle également que les femmes sont moins porteuses des projets entrepreneuriaux culturels et s’intéressent moins à la création des entreprises culturelles. Elles sont plus dans le domaine de l’esthétique (culinaire, vestimentaire, mode) et dans le secteur prestation de service (atelier de couture, décoration…).

8. Profil entrepreneurial culturel dans la ville de Kinshasa
8.1. Interprétation des tableaux

La plupart d’entreprises culturelles (85%) sont reconnues par l’administration publique congolaise comme l’attestent les données de l’enquête. Plus de la moitié, soit 61% ont au moins 5 ans d’expérience dans leur secteur d’activité, contre 39%, (voir annexes graphique 25). À la suite de la décentralisation intervenue, plusieurs opportunités se sont offertes aux entreprises naissantes de se faire identifier auprès de l’administration la plus proche. A Kinshasa, les communes font une première instance dans le processus de création d’entreprises, et s’en suivent des instances supérieures de l’administration provinciale et nationale. D’où la plupart des entreprises enquêtées ont les autorisations de fonctionnement ou les agréments divers.

Graphique 1 : Occupation de fonction dans l’entreprise entre homme et femme

Les femmes sont moins intéressées à la création, à la possession et à la gestion des entreprises culturelles, mais occupent plutôt les postes stratégiques dans les entreprises de service comme l’indique le graphique 1.

Graphique 2 : Effectif en personnel par secteur d’activité

Les entreprises de petites tailles (1 à 10 personnes) sont plus nombreuses soit 284 sur 384, dont le secteur de prestation de service prend 124, 
La taille moyenne d’entreprise (10 à 50 personnes) est de 80 entreprises culturelles sur 384 dont le secteur de prestation de service prend 40, 20 pour la musique, 10 pour le théâtre et le livre. Seulement 20 grandes entreprises détiennent un personnel supérieur à 50 comme le montre le tableau 12 et graphique 5. Ainsi le secteur médiatique en compte 10 et le secteur de prestation de service 10.

Graphique 3 : Etat de l’activité et chiffre d’affaires de l’entreprise

Comme l’indique le graphique 3, les entreprises culturelles Kinoises enquêtées étaient presque toutes en activité à près de 100%, soit 97% contre 3% en situation de cessation d’activité. Et le graphique 4 renseigne que leurs chiffres d’affaires sont compris essentiellement entre 2.000.000fc et 20.000.000fc, qui représente 64% d’entreprises culturelles ayant fait l’objet de notre enquête. 26% ont un chiffre d’affaires de moins d’un million de francs congolais et 10% ont plus de dix millions de francs congolais. Au vu des résultats de cette enquête, la volonté de créer son entreprise culturelle est entravée par l’insuffisance, voire le manque de fonds propres nécessaires.

Tableau 3 : Chiffre d’affaires par secteur d’activité

Secteur d’activité

< 2.000.000Fc

Entre 2.000.000 et

20.000.000Fc

> 20.000.000Fc

Musique

0,0%

16,3%

25,0%

Théâtre

0,0%

8,1%

0,0%

Médiatique

0,0%

0,0%

25,0%

Livre

40,8%

12,2%

25,0%

Prestation de service

49,0%

51,2%

0,0%

Art plastiques et graphiques

10,2%

12,2%

25,0%

Total

98 (25, 52%)

246 (64, 06%)

40 (10, 42%)

Le tableau 3 indiquant une analyse détaillée sur le chiffre d’affaires en secteur d’activités dans l’espace entrepreneurial Kinois montre une concentration tournant entre 2.000.000 et 20.000.000fc dont le secteur de prestation de service détient plus de la moitié, soit 51%. Puis le secteur musical occupe le deuxième rang avec 16,3% et 12,2% pour le secteur du livre, d’arts plastiques et graphiques.

Cet article ne saurait parcourir tous les aspects liés à l’entrepreneuriat culturel et artistique. Nous survolerons dans un pénultième point avant la CONCLUSION les obstacles liés au secteur. Ceux-ci seront aussi abordés de manière très sommaire parce que notre recherche doctorale s’y penchera en détails.

8.2. Obstacles majeurs inhérents à la création, à l’organisation, au développement de l’entrepreneuriat culturel Kinois et son ouverture au commerce international

Graphique 8 : Difficultés à la création de l’entreprise

Sur les 384 entreprises enquêtées, 196 ont éprouvé d’énormes difficultés liées à leurs créations. Cependant, il se révèle que ce problème touche plus le secteur de prestation de service (44%), suivi de la musique (21%), d’arts plastiques et graphiques (20%). Les secteurs du livre 10% et du théâtre, 5%, ont éprouvé des difficultés liées à leurs créations. Le secteur médiatique, lui, n’a eu aucune entrave à la création.

Tableau 5. Contraintes administratives générales à la création

Le secteur de prestation de service subit plus de contraintes administratives à la création : 59,4% ont connu des tracasseries et lenteurs administratives. 77% ont connu des actes de corruption et tracasserie liée aux multitudes taxes. Il a été observé une insuffisance financière à hauteur de 55,1%. Enfin 71,8% d’enquêtés ont buté à l’obstruction d’obtention des documents.

Le secteur de musique a souffert également des contraintes administratives à la création. Ainsi on enregistre 15,2% des tracasseries et lenteurs administratives, 23,3% d’actes de corruption et multitudes taxes. 5,6% se retrouvent respectivement dans l’insuffisance financière et l’obtention des documents. Le secteur du livre n’a pas de cas de corruption. Mais on peut y constater une forte insuffisance financière (16,9%) et l’abondance de taxes (11,8%), les difficultés d’obtention de documents (5,6%).

Graphique 9 : Détention des documents juridiques

L’enquête révèle que sur les 384 Conventions collectives, et statuts d’entreprises, seules 218 détiennent les documents juridiques, dont 178 entreprises disposent des statuts, 208 ont le règlement d’ordre intérieur alors que 80 seulement détiennent les conventions collectives. L’ensemble de ces documents est tenu en grande partie par le secteur de prestation de service, suivi du secteur du livre et des arts plastiques et graphiques, (graphique 9).

Graphique 10 : Signature de contrat de prestation

En Musique, sur les 384 entreprises enquêtées, 129 font signer le contrat de prestation, alors que le secteur de prestation de service en fait largement usage à la hauteur de 53,5% comme le montre le tableau 21 et le graphique 18, suivi de 23,3% pour le secteur du livre.
Dans les entreprises du secteur musical, médiatique, des arts plastiques et graphiques, la signature des contrats de prestation n’est que de 7,8%. La signature des contrats de prestation dans le secteur théâtre est nul, soit 0%.

Graphique 11 : Freins à l’organisation

Sur les 384 entreprises enquêtées, 345 retrouvent des obstacles à l’organisation, dont : 119 entreprises selon la nature d’activités exercées, 228 éprouvent des obstacles d’organisation liés à la carence des infrastructures, 157 éprouvent d’obstacles d’organisation liés à l’ins&e

Par G. BARHAKOMERWA FABOU, dans RIFRA, Presses Universitaires de Kinshasa, 2024