Publications

Article détaillé

Liste des articles.

LA PERCEPTION DE L’ARCHEOLOGIE PAR LA POPULATION KINOISE
(THE PERCEPTION OF ARCHAEOLOGY BY THE PEOPLE OF KINSHASA)

Raphael GAWAYA GALUME
raphaelgalume1701@gmail.com, +243 821032727

Résumé

La République Démocratique du Congo est un pays comprenant une mo-saïque de culture et des possibilités de découvertes des vestiges qui pourront favoriser l’essor de l’archéologie. En dépit de cela, il est regrettable que le domaine de fouilles archéologiques soit très peu exploité ; jusqu’à ce niveau, nous constatons que les fouilles archéologiques et les analyses sont entière-ment financées par les pays étrangers. À ce prix, le pays n’est pas suffi-samment fouillé, faute de l’Etat qui ne dispose pas des moyens pour ce sec-teur.

Mots clés : perception, archéologie et population.
Reçu le : 5 janvier 2024
Accepté le : 8 octobre 2024

Summary

The Democratic Republic of Congo is a country with a mosaic of cultures and opportunities for the discovery of remains that could encourage the de-velopment of archaeology. In spite of this, it is regrettable that the field of archaeological excavations is very little exploited up to this level, we note that the archaeological excavations and the analyses are entirely financed by foreign countries. At this price, the country is not sufficiently excavated, because the state does not have the means for this sector. Key words: percep-tion, archaeology and population.

Key words: perception, archaeology and population.
Received: January 5, 2024
Accepted: October 8, 2024

Introduction

Certains Etats du monde accordent plus d’importance aux archéo-logues juste pour répondre à ces trois préoccupations :
a) La découverte et la conservation des traces matérielles du passé ;
b) La reconstitution de l’histoire passée de chaque société présente ;
c) La transmission de cette connaissance à l’ensemble de la société.
    Ce sont là les trois fonctions d’obédience conservatrice.

La République Démocratique du Congo est un pays comprenant une mosaïque de culture et des possibilités de découvertes des vestiges qui pourront favoriser l’essor de l’archéologie. En dépit de cela, il est regrettable que le domaine de fouilles archéologiques soit très peu exploité jusqu’à ce niveau, nous constatons que les fouilles archéolo-giques et les analyses sont entièrement financées par les pays étran-gers. À ce prix, les pays n’est pas suffisamment fouillé, faute de l’État qui ne dispose pas les moyens pour ce secteur. D’où, le pouvoir public doit prendre des initiatives en vue de relancer le projet des fouilles méthodiques dont le début date de 1925, par l’archéologue Belge Jean Colette à la Gombe/Kinshasa. Les exécutions des fouilles archéolo-giques se sont arrêtées vers les années 1980 en RD Congo. Avec les occupations des terres et les diverses activités qui s’effectuent sur le sol et le sous-sol, les congolais risqueraient de perdre beaucoup de vestiges qui empêcheraient ces derniers à perdre leur culture maté-rielle passée, pouvant avoir des conséquences néfastes sur leur identité culturelle et leur cohésion nationale. (Muya Kamwanga, 1977-1978 : 49-62).

Suite au manque de financement et de la promotion par l’État, la majeure partie de la population de Kinshasa ignore ce que c’est l’archéologie et même le musée. Face à ce problème, nous étions obligé d’aller vers notre population cible pour obtenir leurs avis sur leur perception de l’archéologie, pour établir enfin un pont entre la population, le musée, l’État et les professionnels de l’archéologie. Ce pont consiste tout simplement à proposer les alternatives à l’État, pour que celui-ci favorise la médiatisation des activités de la discipline (fouilles et expositions archéologiques) afin que la population en prenne connaissance, c’est-à-dire que l’État va financer les fouilles archéologiques, l’archéologue va donner l’information aux médias et le journaliste la traite afin que le public la reçoive. Le choix de media s’explique particulièrement par le fait que la télévision est le canal privilégié par lequel les individus regardent le monde (Céline Schall, 2010 : 22).

Les anthropologues recourent aux approches qualitative et quanti-tative pour la récolte les données sur terrain : (Mabiala Matumba : 2008 :15).
- Dans l’approche qualitative, ils utilisent les entretiens et d’autres tech-niques vivantes ;
- Tandis que dans l’approche quantitative, ils utilisent la technique documentaire.

1. Aperçu archéologique

L’archéologie est un champ d’études qui incorpore plusieurs théo-ries et méthodes d’autres disciplines comme l’anthropologie, l’ethnologie, la sociologie et l’histoire. L’archéologie peut être défi-nie comme étant un ensemble de théories, méthodes et techniques uti-lisées pour étudier le comportement humain à partir des restes phy-siques d’activités passées (Jean-Paul Demoule, 2020 :14).

En analysant les restes matériels tels que des objets comme des ré-cipients ou des pirogues, des vestiges architecturaux ainsi que la faune et la flore, les recherches archéologiques sont poussées ; plus intimiste est le portrait obtenu et plus elles révèlent d’informations au sujet de l’occupation humaine.
La recherche archéologique peut être effectuée partout, en milieu urbanisé aussi bien qu’en milieu reculé (rural). Une recherche archéo-logique peut être entreprise par suite d’un projet de réaménagement urbain, de l’inventaire des ressources d’un parc naturel ou de désigna-tion d’un site ou lieu historique.
L’analyse des données recueillies est l’un des plus grands défis de l’archéologie. Ces données sont souvent difficiles à départager, jusqu’un site peut avoir fait l’objet d’occupations successives par dif-férents groupes de personnes, pour pouvoir bien distinguer parmi les périodes historiques et les groupes d’occupation.

Il importe de faire une analyse stratigraphique et une analyse de répartition spatiale des vestiges matériels. Les archéologues doivent porter une grande attention aux indices visibles lors de leurs inven-taires ou recherches archéologiques (fouille), en plus de consigner et de cataloguer adéquatement toutes les observations, car une fois le site fouillé, une bonne partie de la preuve s’en trouve ainsi détruite. Con-sidérées dans leur acception large de discipline scientifique et de moyen de sauvegarde du patrimoine, les implications sociales de l’archéologie touchent des domaines très divers (Dominique Garcia, 2013 : 7).

L’archéologie comme toute science, a une vocation double : Pro-duire des connaissances fondamentales qui sont en perpétuel renouvel-lement parce qu’elles s’inscrivent dans le mouvement général du sa-voir ;
Fournir à la société, les clefs pour la compréhension de l’évolution de notre cadre de vie, environnemental et social. Considérées également dans leur acceptation de discipline scientifique et de moyen de sauvegarde du patrimoine, les implications sociales de l’archéologie touchent des do-maines très divers.

2. Analyse et avis du public sur les expositions archéologiques

Dans notre échantillon de 120 personnes, hommes et femmes inter-rogées seules huit (8), dont sept (7) hommes et une (1) femme ont dit avoir visité les objets archéologiques (artefacts) à Kinshasa au cours de cinq dernières années. On pourrait croire que faute de connais-sances préalables on ne va pas spontanément visiter un musée et qu’il est nécessaire pour faire cette démarche, de posséder une bonne cul-ture historique. Nous aurions pu également penser qu’il s’agissait d’un public qui pense que l’archéologie est une discipline très importante. Pourtant à la question ¨ Pensez-vous que les recherches archéolo-giques en RDC soient utiles ?’’ 98 des personnes interrogées dont soixante-cinq (65) hommes et trente-trois (33) femmes jugent très utiles, 19 hommes jugent plutôt inutiles et 3 dont deux (2) femmes et un (1) homme ne s’expriment pas à ce sujet.

Le groupe de 98 personnes pense que la RDC doit avoir plus d’archéologues pour faire revivre le passé de nos ancêtres à travers les artefacts trouvés dans les fouilles archéologiques. Les autorités de l’Institut des musées nationaux du Congo doivent notamment financer les recherches archéologiques afin que les artefacts trouvés dans ces fouilles permettent aux autorités d’organiser les expositions en public pour inculquer la culture muséale à la jeunesse actuelle qui semble tout ignorer du passé. Ces expositions donneront également aux jeunes le goût de s’intéresser à l’archéologie et aussi le goût de visiter le mu-sée.

Cependant, le groupe de 19 personnes pense que le passé n’a au-cune importance pour les jeunes d’aujourd’hui, alors qu’ils devraient plutôt se référer à la mondialisation pour être dans la même ligne que les pays occidentaux. Les objets archéologiques et les autres objets qui sont au musée font partie de fétiches des ancêtres qui n’apportent rien en termes de développement, ils n’ont pas intérêt à être présentés aux jeunes de peur qu’ils soient ensorcelés. Les jeunes d’aujourd’hui ont plus besoin de ce qui est purement technologique, parce que le monde est en plein essor du numérique et nos jeunes doivent y faire face.

Le groupe de 3 personnes dit n’avoir jamais visité le musée, per-sonne d’entre elles n’a une connaissance sur les artefacts, alors il est difficile d’émettre un point de vue sur un sujet dont on ne maîtrise rien. (Nous demandons juste à l’État de rendre public les activités du musée pour que nous aussi prenions connaissance de ce qui s’y trouve).

3. La perception de l’archéologie et son information

Sur les 120 personnes interrogées, qui de 2018 en 2023 ont mani-festé leur intérêt pour l’archéologie. 112 personnes se plaignent de manque d’information sur l’archéologie et ses recherches et même sur le musée. L’intérêt pour l’archéologie à Kinshasa est à l’image de l’intérêt pour les sciences en règle générale dans l’actualité médiati-sée.

Le public sous informé estime que la place de la recherche et des scientifiques est dans les médias parce que les productions média-tiques et scientifiques sont généralement jugées de grandes qualités, notamment pour sa fiabilité, objectivité et son utilité. Nous constatons que le public apprécie que les découvertes scientifiques soient présen-tées à l’antenne par les auteurs des découvertes eux-mêmes.

Cette remarque concerne l’ensemble des médias et en particulier celui qui sollicite les plus le public a l’occurrence, la télévision, c’est à elle surtout que le public recommande de faire une large diffusion. Il serait souhaitable de prendre en compte ces constatations afin de pro-mouvoir davantage le soutien du public à l’égard du secteur scienti-fique, dont l’importance continue de croitre en Afrique en générale, en république démocratique du Congo en particulier et à Kinshasa plus particulièrement. Les 8 informés perçoivent l’archéologie comme toutes les autres sciences, elle mérite mieux la promotion comme toute science. L’archéologie fait revivre le passé au présent, ses fouilles sont complexes et ça demande beaucoup des moyens, nous exhortons l’état à financer les fouilles, enfin que ses trouvailles soient exposées pour que la population ait l’occasion de se cultiver.

4. Le future de l’archéologie

L’archéologie de demain sera dans la continuité de l’archéologie d’aujourd’hui. Il faut être conscient que l’archéologie a considérable-ment évolué depuis le XIXe siècle. Les archéologues du XIXe s’intéressaient principalement aux oeuvres d’art et éventuellement aux batailles, parce que c’était une grande époque de batailles. On fouillait donc des forteresses, des temples et des champs de bataille éventuel-lement. Les archéologues se sont intéressés au cours du XXe siècle à quelque chose qui devenait prépondérant de la vie, c’est-à-dire la vie économique. Ils ont donc développé des techniques pour essayer de reconstituer l’évolution économique de l’Antiquité en étudiant les amphores (qui servaient à transporter du vin, de l’huile ou des con-serves de poissons) (Ariel suhamy, 2014 : 4).

Aujourd’hui, les archéologues sont confrontés à une crise de l’environnement et ils s’intéressent donc évidemment à ce qui s’est passé dans l’Antiquité. Ils cherchent alors à reconstituer l’évolution des paysages, à savoir s’il y avait plus de forêts, à quelles époques on a défriché, à savoir s’il y avait déjà des catastrophes ou bien savoir s’il y avait déjà de la pollution et de quel type. Ils adaptent à chaque fois les méthodes en fonction des interrogations et des problématiques qu’ils veulent développer. Pour mieux orienter l’archéologie du futur, les archéologues doivent toujours se poser la question de savoir : à quoi seront confrontés nos successeurs. Il est très difficile de dire qu’ils vont plutôt encore étudier l’économie et l’environnement et moins encore les batailles. Mais il est très clair qu’ils auront de nou-velles questions à poser. Ils auront certainement de nouvelles mé-thodes à employer et c’est la raison pour laquelle il est essentiel qu’à côté de l’archéologie préventive que nous développons, nous puis-sions garder un certain nombre de sites ou de vestiges archéologiques intacts pour qu’ils puissent poser leurs questions et y répondre.

La fouille est très nécessaire, parce que l’évolution de notre civili-sation le demande (lorsqu’il faut faire passer une route ou construire un immeuble), il faut que nous ayons le courage de mettre en « jachère historique ». (Norman Yoffee et Severin Fowles, 2010 : 4).

Conclusion et suggestion

Après une longue période d’observations sur terrain, nous sommes arrivé au terme de notre travail, il est impérieux que nous présentions nos suggestions aux autorités compétentes et au public qui pour nous, représentent notre cible.

Conclusion

Le développement de l’archéologie des périodes moderne et con-temporaine a démontré à ceux qui en doutaient l’intérêt de procéder à une enquête sur ces périodes pour les mettre ensuite en discours. Il faut encore militer pour une meilleure prise en compte du subactuel et de l’actuel, rappeler l’importance des enjeux en transcendant la bar-rière de l’enfoui, affirmer la capacité de la discipline à interroger le monde et les sociétés selon des méthodes d’analyse qui n’appartiennent qu’à elle.

Suggestion

Au terme de ce travail, nous suggérons ce qui suit :
Aux publics du musée, de forger une connaissance sur l’archéologie, de comprendre que le musée est une institution scienti-fique, elle a en son sein une multiplicité des connaissances sur les di-vers domaines de la vie ;

Le musée est un lieu de réflexion ; en visitant celui-ci, vous élargis-sez les connaissances sur votre culture et aussi sur les cultures des autres ;
Aux autorités, l’archéologie est restée plus muette dans notre pays il y a plusieurs années, ce qui fait que la grande partie de la population ne soit pas informée de cette dernière. Le mieux à faire serait de fi-nancer les activités archéologiques (fouilles, la conservation, les expo-sitions et médiatisations), pour un bon futur de la discipline.

Bibliographie

- ARIEL SUHAMY, Jean-Pierre, 2014, L’archéologie du futur, en-tretien.
- NORMAN YOFFEE ET SEVERIN FOWLES, 2010, L’archéologie dans les sciences humaines, presses universitaires de France. https://www.cairn.info/revue-diogene-2010-1-page-51.htm.
- MUYA KAMANGA, Les industries préhistoriques de la pleine de Kinshasa, in Études d’histoires africaine, numéro spécial : l’archéologie en Afrique centrale, Presses universitaires de zaïre.
- MABIALA MATUMBA NGOMA, La culture en question : essai d’anthropologie culturelle, Édition culturelles, africaines, Kinsha-sa, 2008.
- DEMOULE Jean-Paul, GILIGNY François, LEHOËRFF Anne et SCHNAPP Alain, Guide des méthodes de l’archéologie, Presse universitaire de France, 2008.
- SCHALL Céline, 2010, La médiation de l’archéologie à la télévi-sion : la construction d’une relation au passé, thèse de doctorat en science de l’information, Université d’Avignon.
- GARCIA Dominique, Livre blanc de l’archéologie préventive, Presse universitaire de France, mars 2013.
- COLETTE, Jean, 1938, Les fouilles de Jean Colette à Kalina, An-nales du Musée du Congo belge, Série I, t.1 (2), p. 25.
 

Par Raphael GAWAYA GALUME, dans RIFRA, Presses Universitaires de Kinshasa, 2024