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PARTICIPATION DE L’IMNC AU PROCESSUS DE LA PAIX EN RDCONGO.
IMNC PARTICIPATION IN THE PEACE PROCESS PEACE PROCESS IN RDCONGO.

Jean KABITSHWA NGUN
Jeankabitshwa@gmail.com +243 816749397

Résumé

Cet article a pour ambition, la recherche d’une cohésion nationale pour une paix durable à travers les différentes collections que conserve l'Institut des Musées Nationaux du Congo (IMNC), en mettant en exergue la conser-vation et l’exposition de son patrimoine culturel avec un regard particulier sur la mémoire collective sans laquelle, la paix durable ne sera possible.

D’aucuns n’ignorent qu'il s’observe actuellement, une montée en RDC, des discours de la haine qui ont la faculté d’inciter à la violence, de saper la cohésion sociale, la tolérance, et de causer des dommages psychologiques, émotionnels et physiques à travers des conflits ethniques, le tribalisme, la haine et d’autres formes d’intolérance et de discrimination.

C’est dans cette perspective que les objets culturels issus des différents groupes ethniques, rassemblés, conservés et exposés dans des musées, pou-vaient participer au rafraîchissement de la mémoire collective en favorisant le sentiment national au sein du peuple congolais en vue de l’esprit de l’unité pour la paix.

Mots clefs : Conservation, Exposition, Patrimoine culturel, Mémoire, col-lective, Paix durable.

Reçu le : 5 janvier 2024 Accepté le : 8 octobre 2024

Summary

This article aims to seek national cohesion for lasting peace through the different collections kept by the Institute of National Museums of Congo (IMNC), highlighting the conservation and exhibition of its cultural heritage. with a particular look at the collective memory without which lasting peace will not possible.

Keywords : Conservation, Exhibition, Cultural Heritage, Collective, Memory, Sustainable peace.
Received : Janvier 5, 2024
Accepted : Octobre 8, 2024

Introduction

Dans sa mission de conserver et d'exposer en public le patrimoine culturel nationale, l’IMNC est appelé à promouvoir sa collection dans l’intérêt de favoriser le vivre ensemble. Notre étude se donne pour importance de relever l’apport du musée en tant qu’un moyen com-plexe et non linéaire peut-il jouer dans un contexte post conflit carac-térisé par la vulnérabilité de certains groupes ethniques. Bref, ce tra-vail aborde la problématique historique liée à la construction d’une mémoire collective pour une paix durable par la conservation et l’exposition du patrimoine culturel congolais à travers la représenta-tion de tous les objets des groupes ethniques présents à l’IMNC autour de la thématique : « vivre ensemble ». Pour se faire, nous nous posons des questions :
❖ Comment le musée peut-il participé au processus de la paix ?
❖ Et quelles sont les mécanismes à mettre en place au sein du musée pour la paix et la cohésion nationale en République Démocratique du Congo ?

En effet, au lendemain de son accession à l’indépendance depuis 1960, l’histoire de la République Démocratique du Congo est caracté-risée par des conflits entre hommes politiques des camps divers, dé-versant aux groupes ethniques et créant pour ainsi dire une insécurité généralisée dans toute l’étendue du territoire national. Des sécessions, rébellions, des tueries, népotismes et tribalisme etc. sont des mots qui peuvent bien illustrer cette situation. Même l’administration publique n'est pas épargnée de cette crise car la sélection aux postes d’emplois et promotions en grades sont faites sur base d’appartenance à un groupe ethnique ou dans un camp politique au pouvoir. L’unité natio-nale est mise en berne et la paix nationale est hypothéquée(1).

Cette situation confuse démontre à quel point la cohésion nationale et la paix durable pour le développement du Congo sont méprisés. D’aucuns n’ignorent que le vrai changement que les Congolais atten-dent et veulent voir ne peut avoir lieu que quand la paix serait restau-rée et cette paix est liée intimement à la cohésion nationale. Grâce à son riche patrimoine culturel provenant les divers groupes ethniques du Congo, l’IMNC organise déjà les expositions et visites guidées, des journées portes ouvertes dans ces différents Musées à travers toute la République Démocratique du Congo afin de permettre à toutes les différentes classes sociales d’aller visiter et voire différentes collec-tions et artefacts, relatant l’histoire du peuple du Congo. Ceci a pour objet de réveiller la curiosité mais aussi de susciter dans l’homme Congolais le sentiment national. C’est dans cette perspective de la recherche d’une cohésion nationale pour la paix durable en RD Congo que l’IMNC pourrait porter sa contribution à travers ces différentes collections.

I. Patrimoine culturel de l’IMNC

La culture est étroitement liée à la nature, particulièrement en Ré-publique Démocratique du Congo où cette nature est source de créa-tion abondante et diversifiées. Nos ancêtres vivaient en équilibre avec leur environnement : ils le respectaient, le ritualisaient et ont dévelop-pé des savoir-faire et « savoir-être » de grande valeur. C’est ainsi que la majeure partie du patrimoine culturel congolais est issue de ce sa-voir endogène(2). Remontant de la vie indigène, à la période de la co-lonisation belge, dont une grande partie fut emportée au musée de Tervuren en Belgique, les collections restantes avaient été récupérées et conservées par l’IMNC. À ce propos, l’Institut des Musées Natio-naux du Congo est une grande réserve du patrimoine culturel congo-lais. Il garde dans ses murs, plus de 600 diapositives, 7000 artefacts et 500 masques venus de tous les coins du pays acquis par legs, par achats où par récolte. Vous y trouverez également des monuments, des objets d’arts contemporains sur l’histoire de notre pays et même des sites historiques y font parti de son patrimoine.

II. De la conservation et exposition, pour la formation de la mémoire collective

Selon wiki dictionnaire, la mémoire est définie comme ensemble des souvenirs ou des représentations historiques partagés par un groupe humain. Elle joue un rôle fondamental dans la construction de l’identité d’un groupe dans la mesure où l’histoire racontée la définit et la valorise(4). Étant la mémoire d’un peuple, elle rassemble le vécu commun d’un groupe en le gardant au présent. Cette mémoire tend à se cristalliser autour des musées et certains lieux symboliques forgeant ainsi la construction des identités collectives. En effet, dans les trois sens du mot : matériel, symbolique et fonctionnel(5).

II.1. Aspect matériel et symbolique pour la formation de la mémoire collective

La RDC a une histoire et possède des objets des cultures maté-rielles de la paléontologie à l’âge du fer en passant par le néolithique jusqu’à la formation des anciens états, Royaumes et empires. Après le déclin des Royaumes, le pays a traversé des moments extrêmement difficiles durant la colonisation. Mais après la seconde guerre mon-diale, il a retrouvé l’indépendance grâce aux mouvements nationa-listes(6).

Malgré l’instauration du régime dictatorial et les guerres de séces-sions consécutives qui ont éclaté après son indépendance, le pays est aujourd’hui en train de développer sa politique de démocratie(7). Cette histoire est entachée aux matériels dont l’ensemble forme la mémoire collective. Exemple, les collections traditionnelles et les monuments à la mémoire du passé, parties intégrantes du processus de la création de la mémoire collective et de la reconstruction de la cohésion nationale, constituent une partie symbolique pour la paix.

II.2. Aspect fonctionnel des objets culturels pour la formation de la mémoire collective

Le modèle d’exposition permanente, centrée sur la cohésion natio-nale et le vivre ensemble que dispose le Musée National de la Répu-blique Démocratique du Congo (MNRDC), associée aux activités des journées portes ouvertes pour un large diffusion au public pouvait servir d’exemple et dont les différents musées des provinces et à tra-vers toute la République sont appelés à emboîter le pas pour la même cause qui est d’atteindre une large public pour une éducation ci-toyenne sur l’unité nationale. En outre, l’organisation des cours sur l’histoire des peuples du Congo et leurs objets, dispensés aux élèves et étudiants à partir de l’école primaire jusqu’à l’université avec une par-tie pratique sur la visite au musées, sites historiques et mémoriaux d’histoires du passé afin de rafraîchir la mémoire collective restent sans équivoque des moyens importants dans ce processus de paix.

Rappelons que les expositions utilisent souvent le devoir de mé-moire pour justifier ses actions ou pour rapprocher l’histoire du passé au présent. De ce fait, les monuments à la mémoire d’histoire du passé nous ramènent à un fait de reconnaissance de soi à travers leurs mes-sages(8). Au final, le défi de la politique d’expositions du mémoire entrepris par L’IMNC devrait faire l’objet d’une mise à jour et ne se-rait réduit à une simple exposition seulement mais beaucoup plus à construire des mémoriaux ou installer des statues qui nous amènent à la construction de la cohésion nationale à travers un peuple conscient de son histoire.

Par ailleurs, l’exposition des objets traditionnels se présentent sou-vent comme la voix du passé et symbolisent le devoir de rappeler à nous-mêmes et au monde entier ce que nous avons vécu et comment cela nous a transformé en ce que nous sommes aujourd’hui en créant pour ainsi dire, la mémoire collective. D’autant plus que celle-ci joue un rôle fondamental dans la transition d’une situation de conflit vers la paix. Plusieurs études montrent que cette période de transition peut devenir le terrain fertile pour la construction d'une identité collec-tive(9).

De ce fait, la conservation de la mémoire collective au sein de mu-sée est déjà son apanage au regard de sa mission et cela stipule sim-plement, promouvoir les collections issues des divers peuples du Con-go ponctuées sur la cohésion nationale pour favoriser le vivre en-semble. C’est pour cela que le musée fait partie des éléments déclen-cheurs de la paix dé par sa capacité éducative qui peut promouvoir une culture de la paix en collectant, affichant et interprétant du matériel lié à la paix(10).

III. De l’exposition pour la paix

Les expositions pour la paix informent le public sur la paix et la non violence à l'aide d'illustrations tirées de la vie d'individus, du tra-vail d'organisations, de campagnes, d'événements historiques, etc. L'une des forces d’exposition au sein du musée est qu'il peut toucher et impliquer un large public, dont beaucoup pourraient ne pas être impliqués dans le mouvement pour la paix en soi. Chaque expositions pour la paix mette un accent et raconte sa propre histoire, présente différents artefacts liés à la paix, à l’unité et se concentre sur diffé-rentes périodes et lieux de l'histoire de la paix(11) une telle exposition est donc celle qui mérite appliquée dans un pays comme le nôtre qui est en quête de la cohésion nationale et de la paix.

IV. Musée comme moyen de favoriser la paix

Le Réseau international des musées pour la paix est un réseau mondial de musées de la paix qui partagent le même désir de cons-truire une culture mondiale de la paix. Il comprend également des jar-dins de la paix et d'autres sites, centres et institutions liés à la paix qui sont impliqués dans l'éducation publique à la paix à travers des expo-sitions, de la documentation et des activités similaires(12).

C’est dans cette optique que l’institut des musées nationaux du Congo se montre plus habile d’organiser des activités culturelles ayant trait à la paix et à la cohésion nationale, en vertu de sa capacité de conserver le patrimoine culturel du pays, dont les sites historiques y font partie. Notons que les Congolais apportent plus de quatre cent cinquante styles à l’art africain. Les objets Africains se retrouvent par-tout dans les musées du monde.

Quand on entre dans ces musées, on a l’impression que les objets qui s’y trouvent sont muets. Or, aujourd’hui, ils ne doivent pas demeu-rer lointains, mystérieux et obscurs. Où qu’ils se trouvent, dans des enclos sacrés, dans des galeries d’art ou dans des musées en Afrique, en occident ou en orient, les objets parlent et livrent des informations à quiconque les interroge. Étant le produit authentique d’un art utili-taire, fonctionnel et symbolique, ils montrent les techniques, les sa-voirs endogènes et le génie créateur des ancêtres. Dès lors, ils appa-raissent comme de véritables et incorruptibles témoignages de l’identité culturelle des peuples du Congo.

Les objets Africains en général et ceux du Congo en particulier an-noncent les fonctions qu’ils remplissent dans leurs milieux d’origine. Ils jouent un rôle très commémoratif, politique, éducatif, religieux, social, symbolique, et communicationnel et démontrent clairement que chaque peuple a un passé glorieux. Ils confirment qu’un peuple ne peut meubler son unité et cimenter sa cohésion que sur le respect des valeurs fondamentales : amour inconditionnel, unité, paix, respect, solidarité, vérité-justice, réconciliation, responsabilité, dialogue, tolé-rance. Elles nous interpellent et nous disent que c’est sur ce pilier cen-tral que les ancêtres ont su ’asseoir leur pouvoir dans la diversité cul-turelle(14).

Cependant, une mise à jour des techniques d’exposition dans des musées du Congo devrait être attractive et émotionnelle dans le but de susciter la passion de l’unité dans le chef de l’homme congolais. Mais aussi une mise en valeur des sites historiques attribués à l’IMNC serait intéressant dans la mesure où chacun de site devrait contenir en son sein des mémoriaux descriptifs relatifs à son histoire dont l’objet serait de construire le vivre ensemble. Comme le dit Syed Sikander Mehdi : mémoire et destin vont de pair. Plus la mémoire est résiliente, provo-cante et habilitée, plus l’avenir est assuré.

L’exposition des monuments commémoratifs érigés en pleine aire, permanente ou temporaire soit-il, avec un accent sur l’unité nationale dans les enclos des musées ou dans des sites aménagés est l’un de moyen attractif d’atteindre un large public(16). Par exemple, les mo-numents de l’histoire de la colonisation, illustrant notre histoire du passé sur ce que nous avons connu pendant la colonisation et les fi-gures qui ont marqué cette colonisation (Roi Léopold, Stanley etc.) Ces éléments déclencheurs de la prise de conscience collective sur l’histoire commune que nous avons construit ensemble et dont l’intention pieuse, peuvent se profiter comme une terre fertile pour planter notre cohésion nationale.

Conclusion

En guise de conclusion, cet article vise à montrer comment l’IMNC peut participer au processus de paix, lors des conflits que sévissent les différents groupes ethniques, de par sa capacité de conserver les ob-jets culturels qui retracent l’histoire des différents peuples de la RDC, d’autant plus que la culture propre d’un peuple a toujours été le pré-mices de toute révolution, Ainsi donc, les bonnes techniques d’expositions basées sur la cohésion nationale dans les différents mu-sées du Congo peuvent favoriser une paix durable. D’aucun n’ignore que l’héritage culturel est comme une force authentique inépuisable et agissante d’un peuple qui lui permet de relever le défi de son dévelop-pement dans tous les domaines.

Notes

1. Www. Unesco. Org. Construire le vivre ensemble et cohésion sociale par la lutte contre le discours de haine en RDC. Oc-tombre 2021.
2. Idem.
3. www .cspps .org . La cohésion nationale pour une paix et un développement durable-une perspective de la siera leone, 20 Novembre 2019.
4. DILEMAS, la recherche d’une paix durable à travers la justice transitionnelle et le rôle de la mémoire : un regard sur la Tunisie contemporaine, ed. Universidace federal do Rio de jeaneiro, vol.12, N°1, pp.195-201, 2019.
5. MBUYI KABUMBA, « la République Démocratique du con-go » ; les droits humains, les conflits et la construction /destruction de l’état, ed. Fundacio Solidaritat UB et inrevés, Lubumbashi , pp.7-8, 2009.
6. HENRY BUNDJOKO BANYATA, Catalogue Vivre ensemble, éd. Koica, Novembre 2019, p.15
7. DILEMAS, Op.cit.
8. SYED SIKANDER MIHDI, « Mémoires, Mémoriaux et Musées pour la paix », éd. Blogs, 2021, p.3.
9. ANNE-MARIE BOUTTIAUX, « Afrique : musées et patri-moines pour quels publics », éd. Karthala, 2006, p.16.
10. Idem.
11. Le Musée Guerre et Paix en Ardennes. C’est un musée du con-seil départemental situé à Novion-Porcien.
12. HENRY BUNDJOKO BANYATA, op.cit.
13. MARIE- CLAIRE LAVABRE, « Mémoire collective comme métaphore », éd. Mélanges de la casa Velázquez,50-1/ 2020, 275-283, pp.1.

Bibliographie

- DILEMAS, La recherche d’une paix durable à travers la justice transitionnelle et le rôle de la mémoire : un regard sur la Tunisie contemporaine, Ed. Universidace federal do Rio de Janeiro, vol.12, N°1, pp.195-201, 2019.
- BUNDJOKO BANYATA Henry, Catalogue Vivre ensemble, éd. Koica, Novembre 2019.
- Le Musée Guerre et Paix en Ardennes. C’est un musée du conseil départemental situé à Novion-Porcien.
- LAVABRE Marie-Claire, « Mémoire collective comme métaphore », éd. Mélanges de la casa Velázquez,50-1/ 2020, 275-283.
- MBUYI KABUMBA, La République Démocratique du congo ; les droits humains, les conflits et la construction /destruction de l’État, ed. Fundacio Solidaritat UB et inrevés, Lubumbashi.
- SYED SIKANDER MIHDI, « Mémoires, Mémoriaux et Musées pour la paix », Ed. International Science concil, 28 mai 2021.
- www.cspps .org . La cohésion nationale pour une paix et un développement durable-une perspective de la siera leone, 20 Novembre 2019.
- www. Unesco. Org. Construire le vivre ensemble et cohésion sociale par la lutte contre le discours de haine en RDC. Octobre 2021.
- BOUTTIAUX Anne-Marie, Afrique : musées et patrimoines pour quels publics, éd. Karthala, 2006.

Par Jean KABITSHWA NGUN, dans RIFRA, Presses Universitaires de Kinshasa, 2024