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SAGESSE DE LA VEILLE ARCHIVISTIQUE POUR LA PRESERVATION DU PATRIMOINE CULTU-REL EN RD CONGO
Essai de responsabilité des archivistes congolais
WISDOM OF ARCHIVAL MONITORING FOR THE PRESER-VATION OF CULTURAL HERITAGE
IN DR CONGO
Essay on the responsibility of Congolese archivists

Nicolas KAYEMBE TSHIBAMBA
nicmi24kayembe@yahoo.fr +243 81 50 80 651, +243 85 48 04 710

Résumé

Le développement intégral d’un pays marche avec la gestion efficace des flux d'informations. Cette réflexion s’inscrit dans le cadre de la journée in-ternationale des archives qui est célébrée chaque année par la communauté archivistique mondiale. Le thème principal de l’année 2022 fut : « Nous Sommes Les Archives ». Dans cet article, nous essayons de répondre à une exigence, celle de dissiper les incompréhensions, le malentendu et la confu-sion existant autour de la mémoire et des archives, des silences et absences dans les archives, des préjugés dans la profession d’archiviste. L’objectif visé est de promouvoir la sagesse de la veille archivistique et de favoriser la prise de conscience sur l'importance des archives au sein de l’ensemble de la population de la République Démocratique du Congo.

Mots clés : Gestion d’archives, Archivistes, Mémoire, Veille archivistique, Informations organiques.

Reçu le : 5 janvier 2024 Accepté le : 5 décembre 2024

Abstract

The integral development of a country works with the effective manage-ment of information flows. This reflection is part of International Archives Day which is celebrated each year by the global archival community. The main theme of the year 2022 was: “We are the Archives". In this article, we try to respond to a requirement, that of dispelling the misunderstandings, misunderstandings and confusion existing around memory and archives, silences and absences in archives, prejudices in the archivist profession. The objective is to promote the wisdom of archival monitoring and to raise awareness of the importance of archives among the entire population of the Democratic Republic of Congo.*

Keywords: Archive management ; Archivists ; Memory; Archival old; Or-ganic information.
Received: Janvier 5, 2024
Accepted: Decmber 5, 2024

Introduction

Depuis novembre 2007, la communauté archivistique mondiale cé-lèbre la journée internationale des archives afin de mettre en valeur les archives et valoriser les archivistes. En d’autres termes, faire prendre conscience d’abord au public de l’importance des archives et des do-cuments. Ensuite, informer les décideurs sur les avantages que procure un bon archivage pour assurer une bonne gouvernance susceptible de conduire à un développement durable de son environnement immé-diat. Enfin, faire émerger dans les secteurs public et privé la nécessité de conserver les archives sur le long terme ainsi que d’en faciliter l’accès.

En juin 2022, les experts du monde entier ont, dans différentes conversa-tions, décidé d’approfondir les sujets relatifs au thème de l’année propo-sé à savoir « Nous Sommes Les Archives ». Il s’agira donc de discuter au-tour de la « De la mémoire et des archives, des silences et absences dans les archives, des préjugés dans la profession d’archiviste, et plus en-core. Lorsque nous parlons de « Nous Sommes Les Archives », nous par-lons des archivistes. Les archives représentent les pratiques et les normes professionnelles des archivistes, mais elles nous affectent également en tant que praticiens». (https://archivistes.qc.ca/2022).

Dans certains pays comme l’Alger, les experts des archives et de la mémoire ont souligné le jeudi 9 juin 2022 que « « Le secteur des ar-chives avait besoin de programmes répondant au développement technologique. Pour sa part, Bouabdallah Ghania, a précisé que : « les institutions d'archives sont "un terreau fertile" pour l'application des technologies modernes en raison des facilitations qu'elles offrent en matière de préservation numérique et d'équipement des bases de données et de recherche ». (https://www.lnr-dz.com › ). Il s’agit de la conscientisation.

Afin de contribuer au débat de la journée internationale des ar-chives sur le thème de l’année en République démocratique du Congo, nous pouvons évoquer l’anecdote du Professeur Ngoma Binda Elie Phambu lors d’une conférence qu’il avait donnée à Banza-Ngungu en 2008 :

J’aimerais raconter une courte anecdote qui fait réfléchir à partir, juste-ment, d’une certaine honte qu’elle nous inflige. Lors de l’un de mes sé-jours en Allemagne, en 1989, je me rends à Brène pour un colloque. Je croise un collègue, un jeune ethnologue allemand, je m'identifie fils Kon-go du Zaïre, mon non Ngoma signifiant « tambour ». Aussitôt il s’enthousiasme, se rappelant ses lectures de La vie quotidienne au Royaume Kongo, ouvrage écrit par Georges Balandier. Et il me rappelle le célèbre constat de Leo Frobenius qui fit savoir au monde cette vérité que « les Noirs du Royaume Kongo sont civilisés jusqu’à la moelle des os ». Le jeune allemand me confie son vif désir de visiter un jour la capi-tale Mbanza Kongo, le palais royal et bien d’autres monuments de l’ancien et prestigieux Royaume. Je dis à mon ami que c’était là une idée admirable, et que je l’attendais avec joie et impatience. Il me dit au re-voir et alla aborder un autre collègue au macaron de jeune boursier sur la poitrine. (NGOMA BINDA, 2008 : 93).

Et le Professeur Elie Phambu NGOMA BINDA de poursuivre :  Et, resté seul, pleurant sous cape en mon coeur, je me dis, méditant tris-tement : mais, inexistant dans la cité royale, excepté, me dit-on, de maigres ruines d’une cathédrale et un arbre dit magique et mystérieux !
Devais-je lui dire la vérité, qu’il n’y a presque rien, sinon rien du tout à voir dans ce très honoré et très célèbre Royaume Kongo ? A coup sûr ce-la eût été, aux yeux de certains, une attitude peu diplomatique, voire an-tipatriotique. C’est, en toute légitimité, une question d’honneur, d’un mi-nimum de fierté humaine. Et vous, que pensez-vous que j’aurais dû dire ou faire ? Y a-t-il quelque chose, en notre pouvoir, ici, maintenant et dans le futur proche, que nous puissions faire ? Pour aider à trouver la réponse, tous ensemble, je suis obligé d’élaborer, de réfléchir à partir du thème qui m’a été proposé : comment assumer et valoriser, aujourd’hui, dans la Province du Kongo Central, l’héritage diplomatique du Royaume Kongo ? (NGOMA BINDA, 2008 : 93-94).

Honte à la République démocratique du Congo, honte à sa mé-moire, honte aux archivistes congolais. Une ignominie, mais pas une fatalité. Faut-il recourir à une sagesse ? Pour quelle responsabilité ? Cette réflexion structurée en quatre points vise à mettre en exergue la sagesse de la veille archivistique. Celle-ci concerne la gestion des flux d’informations organiques en République Démocratique du Congo. Ce qui nous aidera à fixer l’opinion sur ce qu’on entend par sagesse de la veille, présenter un essai de responsabilité de l’archiviste et faire quelques recommandations avant de tirer une conclusion.

1. Compréhension du concept ‘’Sagesse de la veille archivis-tique’’

Le premier point de cet article évoque un concept rarement exploité en archivistique. Afin de mieux appréhender ce qu’il veut dire, nous procédons par la compréhension de ce qu’il représente. Cette étape nous conduira de manière aisée à saisir le sens de la veille technolo-gique pour approfondir celui de veille archivistique qui va nous ame-ner vers le rôle et les fonctions de cette dernière.

Le développement économique, social et culturel d’un pays ne va pas sans la gestion efficace des flux d'informations. Gérer ces der-nières dans un pays, c’est engager les ressources disponibles selon le contexte, c’est créer des réseaux à l’intérieur et à l’extérieur, développer la vision du service et des archives, réunir les décideurs et les mo-tiver autour de cette vision, inventer de nouvelles façons de gérer les archives, préserver la raison d’être et la pertinence du service d’archives, atteindre l’efficacité permettant le meilleur usage des res-sources disponibles, satisfaire le personnel et l’administration. Pour toutes les entreprises, Jean-Michel Oullion dit :

L’information est devenue une denrée stratégique pour les entreprises, dans un contexte de mondialisation de l’économie et d’essor des nou-velles technologies de la communication. Si elle veut préserver ses atouts face à une concurrence qui s’exacerbe en permanence, l’entreprise doit pouvoir anticiper les tendances du marché ainsi que les mouvements des compagnies rivales. Pour cela, il faut pouvoir notamment s’approprier les technologies en voie d’apparition. D’où l’importance capitale d’une recherche de fond, également appelée « veille technologique ». (OUL-LION, 2002 : 100-101).

1.1 Veille technologique

La veille technologique consiste à s’imprégner, au sein de l’entreprise, des toutes les innovations, non seulement dans le do-maine technologique, mais aussi archivistique, bibliothéconomique, éditoriale, etc. C’est à l’archiviste-veilleur que revient la lourde res-ponsabilité de découvrir sur Internet les informations essentielles pour son entreprise. Tout service d’archives doit-être gratifié d’un cadre de gestion convenable permettant une adaptation permanente. Les archivistes doivent y instaurer une véritable culture de l’information. Normand Charbonneau et Bruno Lemay précisent : « En effet, afin de maintenir sa pertinence dans le contexte, le service d’archives devra être cons-tamment informé de ce qui meut l’environnement dans lequel il évolue et les parties prenantes avec qui il interagit» (Charbonneau et Lemay, 2015 : 90-91). La culture de surveillance de l’information dont il est question est ce que nous appelons la veille archivistique.

À l’ère où les technologies de l’information et de la communica-tion, incontestablement utilisées chez nous, offrent encore plus d’opportunités, d’innovations et de créations, elles doivent nous servir aussi à gérer efficacement ces actifs si critiques dans le contexte de la République Démocratique du Congo.

Lars-Berno Fredriksson dit :
Nous vivons [actuellement] à l’ère de la société de l’information. Nous assistons en effet à une production d’informations sans précédent. Les technologies de l’information n’en sont pas les seules responsables, les progrès techniques ne représentant qu’un aspect du phénomène. Il est toutefois impensable de constater que seule une négligeable partie de toute cette information serait conservée si des actions concrètes n’étaient pas décidées par le spécialiste en la matière. Le contenu des bases de données représente une partie du problème. Pour assurer l’archivage des données, ces dernières doivent être extraites du système en exploitation puis stockées dans un format approprié et la documentation nécessaire doit être recueillie ». (FREDRIKSSON, http://old.ica.org).

1.2 Veille archivistique

Collecter et analyser les informations essentielles, assurer l’archivage et informer en temps opportun, constituent donc une prio-rité pour l’archiviste-veilleur. Pour le cas de République Démocra-tique du Congo, Albert Mban confirme que le sous-développement, en fin de compte,
N’est peut-être que la conséquence de l’incapacité de générer de l’information, de la traiter valablement, de la mettre à jour, de la trans-former régulièrement et de la partager équitablement. Loin d’être un simple problème pour les techniciens et les experts, l’information est déjà et sera de plus en plus la question politique majeure et déterminante éco-nomique et socio-culturelle essentielle de tout projet de société. (MBAN, 2007 : 4).

Dans leur livre intitulé Le métier de documentaliste, Jean-Philippe Accart et Marie-Pierre Rethy citent F. Jakobiak en ces termes :
La veille est l’observation et l’analyse de l’environnement scientifique, technique, technologique et économique de l’entreprise pour contrer les menaces et saisir les opportunités de développement. Elle va consister en particulier à détecter des informations, des renseignements, au fur et à mesure de leur apparition et à les exploiter au mieux grâce à ses réseaux d’expert. (Jean-Philippe ACCART et Marie-Pierre RETHY, 1999, p. 211).

La philosophie de la veille repose sur trois préoccupations : consti-tuer la bonne information, donner la bonne information à la bonne personne au bon moment afin de prendre une bonne décision. Mais qui constitue cette bonne information ? Qui garde cette bonne infor-mation ? Qui doit donner cette bonne information ? C’est la raison pour laquelle l’archiviste prend la responsabilité du veilleur dont le rôle consiste à mettre en place des réseaux pour collecter et analyser les informations primordiales afin d’anticiper les actions et propulser leur évolution. Ces informations fournies aux responsables sont trai-tées de façon à les rendre plus fiables.

Avec la veille, le métier d’archiviste devient de plus en plus com-plexe. Cela signifie que la coopération internationale et le partage des connaissances sont plus précieux que jamais. Par conséquent, la pro-fession devient hétérogène au sein des organisations où elle est exer-cée.
L’archiviste a pour mission de veiller sur le patrimoine historique, de relever les défis que pose la société de l’information et d’être ca-pable de faire face à la nature toujours plus complexe et hétérogène du traitement des documents d’aujourd’hui. Ceci implique qu’en dehors de l’intérêt pour son métier et d’autres disciplines, l’archiviste doit posséder des qualités de contact et être ouvert aux technologies de l’information. De cette manière, personne ne peut le contester l’archiviste qui devient veilleur.

La veille se trouve entre les réseaux humains et les technologies. Elle consiste à écouter, s’informer pour mieux agir. Elle permet de comprendre le champ de son activité dans toutes ses facettes et d’être attentif aux risques des informations (archives importantes à collecter, chercheurs attitrés, les supports adaptés aux données à archiver, logi-ciels à utiliser, mises à jour urgentes à effectuer, etc.). Cette particu-lière attention donne un avantage compétitif certain.
La liste des risques ne se résume pas à ceux évoqués. Certains sont plus reliés à l’aspect informatique qu’à l’aspect archivistique. Mais la gestion des risques interpelle la conscience de chaque membre du ser-vice. La cohésion dans les activités d’archivage est maintenue grâce à la bonne collaboration de chaque acteur du système archivistique.

Ayant les compétences d’animer et de motiver l’ensemble du per-sonnel dans une organisation, et au-delà de sa vigilance, l’archiviste soigne le traitement de l’information recueillie qu’il transmettra à qui de droit en vue d’une bonne action pouvant conduire à la stratégie de l’organisation.
La présence d’un archiviste est pour une organisation le moyen de résoudre des problèmes quotidiens et avenirs grâce à une prise en compte de l’ensemble des facteurs susceptibles d’influer sur ses acti-vités. L’archiviste ne fournit pas l’information brute mais fiable, ac-tuelle et analysée faisant apparaître des opportunités, des alertes et des investissements en vue d’orienter les choix stratégiques.

1.3 Rôle et fonctions de la veille archivistique

Le développement économique, social et culturel d’un pays ne va pas sans la gestion efficace des flux d'informations. Gérer des flux d’informations dans un pays, c’est engager les ressources disponibles selon le contexte. C’est aussi créer des réseaux à l’intérieur et à l’extérieur de son environnement, développer la vision du service et des archives, réunir les décideurs et les motiver autour de cette vision, inventer de nouvelles façons de gérer les archives, préserver la raison d’être et la pertinence du service d’archives, atteindre l’efficacité per-mettant le meilleur usage des ressources disponibles, et, satisfaire le personnel et l’administration.

Pour toutes les entreprises, Jean-Michel Oullion dit : L’information est devenue une denrée stratégique pour les entreprises, dans un contexte de mondialisation de l’économie et de l’essor des nou-velles technologies de la communication. Si elle veut préserver ses atouts face à une concurrence qui s’exacerbe en permanence, l’entreprise doit pouvoir anticiper les tendances du marché ainsi que les mouvements des compagnies rivales. Pour cela, il faut pouvoir notamment s’approprier les technologies en voie d’apparition. D’où l’importance capitale d’une recherche de fond, également appelée « veille technologique ». (OUL-LION, 2002 : 100-101).

La veille archivistique consiste à s’imprégner, au sein de l’entreprise, des toutes les innovations en rapport avec les archives. C’est à l’archiviste-veilleur que revient la lourde responsabilité de découvrir les informations essentielles pour son entreprise. Tout service d’archives doit-être gratifié d’un cadre de gestion convenable permettant une adaptation permanente. Les gestionnaires, archivistes doivent y instaurer une véritable culture de l’information. Normand Charbonneau et Bruno Lemay précisent : En effet, afin de maintenir sa pertinence dans le contexte, le service d’archives devra être constamment informé de ce qui meut l’environnement dans lequel il évolue et les parties prenantes avec qui il interagit (Charbonneau et Lemay, 2015 : 90-91). La culture de l’information dont il est question s’appelle la veille archivistique.

Lars-Berno Fredriksson dit :
Nous vivons [actuellement] à l’ère de la société de l’information. Nous assistons en effet à une production d’informations sans précédent. Les technologies de l’information n’en sont pas les seules responsables, les progrès techniques ne représentant qu’un aspect du phénomène. Il est toutefois impensable de constater que seule une négligeable partie de toute cette information serait conservée si des actions concrètes n’étaient pas décidées par le spécialiste en la matière. Le contenu des bases de données représente une partie du problème. Pour assurer l’archivage des données, ces dernières doivent être extraites du système en exploitation puis stockées dans un format approprié et la documentation nécessaire doit être recueillie. (FREDRIKSSON, http://old.ica.org.).

À l’ère où les technologies de l’information et de la communication nous offrent encore plus d’opportunités, d’innovations et de créations, elles doivent nous servir aussi à gérer efficacement ces actifs si cri-tiques dans le contexte de la République Démocratique du Congo qui nous inviteraient davantage à la responsabilité.

2. Essai de responsabilité à l’intention des archivistes congolais

Anouk Dunant Gonzenbach et Pierre Flückiger disent :
L’archivage contribue à documenter l’activité des institutions publiques, à assurer la continuité et le contrôle de leur gestion, ainsi que la sécurité du droit. Il sauvegarde les intérêts légitimes de personnes touchés [tou-chées] ou de tiers, ainsi que ceux de la science et de la recherche (DU-NANT GONZENBACH et FLÜCKIGER, 2015 : 182). Ils poursuivent : Les archives et les archivistes remplissent plusieurs rôles. Parmi eux, on peut encore citer celui qu’ils jouent dans le domaine sociétal, en particu-lier pour les administrations publiques. Les attentes des citoyens face à l’Etat sont grandes et légitimes. (DUNANT GONZENBACH et FLÜCKIGER, 2015 : 185).

Ces principes sont bien au coeur de la mission première des archi-vistes. Cette dernière ne pourra être atteinte qu’aux conditions d’être responsables, entreprenants, performants et compétents. Ces qualités peuvent être comprises de la manière ci-après :

2.1 Responsabilité

L’archiviste, responsable du service d'archives dans le contexte congolais est un fonctionnaire, un agent de l'État. Ses responsabilités officielles consistent à préserver, enrichir et faire connaître le patri-moine dont il a la charge. C’est ainsi qu’il peut :

a. élaborer le projet scientifique et culturel de son service et organise sa mise en oeuvre ;
b. inscrire son action dans le cadre de la politique générale de la struc-ture dont il dépend, dans le respect des règles et pratiques profes-sionnelles des missions légales des services d'archives ;
c. être le garant du bon fonctionnement de son service, tant au regard de la gestion des moyens matériels, budgétaires et humains que du traitement scientifique et de l'accueil des publics ;
d. prendre en considération les intérêts tant de l’administration que des autres usagers et participer au développement des savoirs, par des actions de diffusion, de conseil, de formation et de recherche.

2.2 Activités

Les activités de l’archiviste sont d’ordre organisationnel, scienti-fique, technique, culturel et de formation ci-dessous :

a. Activités organisationnelles

Il s’agit de :
- déterminer les orientations stratégiques du service et négocier les moyens nécessaires à leur mise en oeuvre ;
- mettre en place et animer l'organisation interne et la formation du personnel pour répondre aux objectifs découlant de ces orien-tations.

b. Activités scientifiques et techniques

Il est question de :
- mettre en oeuvre la politique de conseil, de contrôle et de col-lecte des fonds d'archives auprès de tous les producteurs relevant de son domaine de compétence, assurer la préservation des ar-chives ;
- maîtriser les tendances de la recherche scientifique aux archives et élaborer des projets de recherche ;
- veiller à la bonne conservation et à l'intégrité des collections, te-nir à jour le récolement permanent ;
- diriger les processus d'évaluation et de sélection des documents d'archives, organiser et contrôler les opérations de classement et la rédaction des instruments de recherche descriptifs ;
- concevoir et conduire les projets de valorisation et de diffusion du patrimoine dont il a la charge auprès du public le plus large.

c. Activités culturelles

Nous parlons de (d’) :
- développer une politique de partenariat avec l'ensemble des ac-teurs environnants, notamment scientifiques et culturels ;
- assurer la communication des documents en application des dis-positions légales et garantir ainsi le respect des droits des per-sonnes et de l'accès à l'information.

d. Activités de formation

Elles consistent à :
- organiser et accompagner toutes les actions d'information, de sensibilisation, d'éducation et de formation en relation avec les archives ;
- favoriser, en particulier, la connaissance des règles et pratiques archivistiques, et contribuer à l'égal accès de tous au patrimoine, au savoir et à la culture.

2.3.Compétences

Les compétences inhérentes à l’exercice des fonctions d’un ar-chiviste sont, par nous, résumées dans le tableau ci-dessous :

Tableau 1: Compétences d’un archiviste

Ce tableau condense, en principe, l’essentiel du dynamisme et des valeurs que doit incarner l’archiviste responsable du service d’archives pour le bon fonctionnement de son service. Pour accomplir de façon optimale son rôle de professionnel de la gestion de l’information organique consignée, André Gareau ajoute et insiste sur le fait que l’archiviste devra devenir :
- « agile : il saura s’adapter à l’évolution technologique et faciliter le changement ;
- batailleur : il saura défendre l’importance des archives dans son organi-sation ;
- créatif : il sera capable d’imaginer des moyens novateurs pour réaliser sa mission ;
- enthousiaste : il sera déterminé, ambitieux, entrepreneur, convaincant et gagnant ;
- intègre : il sera d’une grande probité, éthique et transparent ;
- geek : il sera habile avec les médias sociaux, les wikis et autres outils de collaboration ;
- orienté client : il sera ouvert, souple, attentif aux besoins des clients et patient
- proactif : il sera polyvalent, positif, fonceur, opportuniste et leader ;
- connu et reconnu : il sera visible, accessible, disponible et crédible »
(GAREAU, 2015 : 226-227).

Si l’archiviste réussit à développer les qualités personnelles et les compétences professionnelles telles que détaillées ci-haut, son rôle de la gestion de l’information sera préservé bien au-delà. Ainsi, les ser-vices d’archives doivent donner à l’ensemble de la République Démo-cratique du Congo le meilleur qu’elle attend d’eux. Elie Phambu NGOMA BINDA dit : « La grandeur d’un peuple passe par de grands rêves ; et les grands rêves germés de petits cer-veaux isolés ne prennent forme et substance qu’assumés par la com-munauté» (NGOMA BINDA, op. cit. : 100).

3. Recommandations

Nous formulons et dégageons les grands axes et rêves qui contri-buent à la fondation du grand chantier archivistique en République Démocratique du Congo. Ils se résument en un programme urgent de sauvetage et constituent les étapes ou les projets à réaliser dans le do-maine des archives. Ce programme a pour objectif de sauver les ar-chives administratives qui sont empilées dans les différents locaux et caves dans l'administration de la République Démocratique du Congo. Quand on sait que ces documents présentent plusieurs intérêts, entre autres, recherche scientifique, justification des droits ou historique.

Le grand rêve repose sur le programme urgent de sauvetage des ar-chives en général et des archives orales et audiovisuelles en particu-lier. Il doit être innové par l’Institut des Archives Nationales du Congo jusqu’à sa réalisation. Le Ministère de la Culture, Arts et Patrimoines doit faire de ce programme une des priorités. Il s’agit, entre autres, d’(de) :
- identifier et de localiser les archives des institutions et des entreprises publiques abandonnées dans plusieurs endroits dispersés ;
- trier, sélectionner et éliminer les archives qui ont perdu toute valeur ad-ministrative, financière ou légale sans oublier les doublons ;
- élaborer un calendrier de conservation suivi du plan de classement dans chaque institution ou entreprise publique au travers leurs services d’archives respectifs tout en respectant les règles de conservation ;
- étudier les besoins des services publics en termes de ressources humaines, financières et matérielles permettant la mise en place d'un système effi-cace d'archivage des documents ;
- construire un bâtiment digne des Archives nationales pour pouvoir y lo-ger tous les services qui s’imposent. Ce bâtiment doit pouvoir respecter toutes les normes internationales en vigueur en matière de température, d'hygrométrie, de protection contre la lumière, le feu et le vandalisme ;
- réviser et actualiser la loi portant régime général des archives ;
- coordonner les opérations de versement régulier des archives à l’Institut des Archives Nationales du Congo après la construction d’un bâtiment méritant des Archives nationales ;
- mettre en place une politique de recrutement et de formation des archi-vistes (initiation) du personnel des institutions et entreprises publiques à mieux gérer les archives administratives. A notre sens, nous pensons que c’est une des premières mesures à prendre en réquisitionnant tous les ar-chivistes qui terminent à l’Université de Kinshasa, Unikin et à l’Institut Supérieur des Statistiques, (ISS);
- organiser et élaborer un plan de numérisation des archives historiques pour des raisons de préservation et d’exploitation ;
- investir dans la gestion électronique des archives afin de faciliter les échanges administratives à travers les nouveaux moyens de communica-tion, travail en réseau. La conservation des documents électroniques a une certitude au même titre que celle des documents consignés.

Conclusion

En guise de conclusion, l’archiviste-veilleur collecte les documents d’archives, les analyse, assure l’archivage de ceux qui sont essentiels. Il invente de nouvelles façons de les gérer afin d’atteindre l’efficacité permettant le meilleur usage des ressources disponibles. Il les com-munique en temps opportun pour satisfaire le personnel et l’administration. C’est la Sagesse de la veille archivistique pour la préservation du patrimoine culturel en République Démocratique du Congo, un essai de responsabilité que nous avons développé dans l’optique de conscientiser la population sur l’importance des ar-chives, sensibiliser les décideurs sur les avantages d’un bon archivage afin d’encourager une bonne gouvernance dans le souci d’aller vers un développement intégral et durable. Faire émerger la conscience dans les secteurs public et privé vers la nécessité de conserver les archives sur le long terme ainsi que d’en faciliter l’accès, reste une tâche im-portante pour les archivistes veilleur.

La République Démocratique du Congo se doit, en ce qui a trait à la préservation de ses archives, d’appliquer les principes, les méthodes et les techniques les plus modernes pour augmenter son efficacité ad-ministrative et fournir aux institutions et entreprises congolaises un exemple convaincant et irrésistible.

Bibliographie

- ACCART Jean-Philippe et RETHY Marie-Pierre, Le métier de documentaliste, Paris, Editions du Cercle de la Librairie, 1999.
- CHARBONNEAU Normand et LEMAY Bruno, Le directeur d’un service d’archives, conservateur ou entrepreneur ?, in Paul Servais et Françoise MIRGUET, Archiviste de 2030. Réflexions prospec-tives, Louvain-la-Neuve, Academia, 2015.
- DUNANT GONZENBACH Anouk et FLÜCKIGER Pierre, L’archiviste à la croisée des chemins ? La profession d’archiviste face à ses défis : se rendre indispensable ?, in Paul Servais et Fran-çoise MIRGUET, Archiviste de 2030. Réflexions prospectives, Louvain-la-Neuve, Academia, 2015.
- GAREAU André, Réflexions sur la place de l’archiviste dans la convergence de la gestion de l’information, in Paul Servais et Françoise MIRGUET, Archiviste de 2030. Réflexions prospectives, Louvain-la-Neuve, Academia, 2015.
- MBAN Albert, Les problèmes des archives en Afrique, à quand la solution, Paris, Harmattan, 2007.
- NGOMA BINDA Elie Phambu, L’assomption et la valorisation de l’héritage diplomatique du Royaume du Kongo face aux enjeux ac-tuels de la province du Kongo Central, in UNIVERSITE KONGO, La diplomatie dans l’ancien Royaume du Kongo. Etude historique et prospective, Actes du 1er week-end scientifique de Mbaza-Ngungu, du 29 au 30 novembre 2008, en commémoration des 400 ans de la mort de Nsaku Ne Vunda, premier Ambassadeur du Royaume du Kongo auprès du Saint-Siège, Mbanza-Ngungu, Presses de l’Université Kongo, 2008.
- OULLION Jean-Michel, Les métiers du multimédia et d’Internet, Paris, L’Etudiant, 2002, p. 100-101.
- FREDRIKSSON Lars-Berno, Archives de la Conférence Interna-tionale de la table ronde des Archives (Citra), https://old.ica.org/citra/reykjavik_fr/resume/fredriksson.rtf, Consul-té le 20 juin 2022.
- https://archivistes.qc.ca/2022/05/05/semaine-internationale-des-archives-iaw2022/, consulté le 13 juin 2022.
- https://www.ica.org/fr/la-journee-internationale-des-archives-en-2013, consulté le 17 juin 2022.
- https://www.lnr-dz.com › 2022/06/11 ›, consulté le 7 juin 2022.
 

Par Nicolas KAYEMBE TSHIBAMBA, dans RIFRA, Presses Universitaires de Kinshasa, 2024